Dossier d’œuvre architecture IA29004640 | Réalisé par
Lécuillier Guillaume
Lécuillier Guillaume

Chargé d'études d'Inventaire du patrimoine à la Région Bretagne.

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Le Goualher Jacques (Contributeur)
Le Goualher Jacques

Historien briochin, auteur de nombreux travaux sur la ville. Il est membre du Centre de recherches et de documentation sur le monachisme celtique, de la Société d'histoire et d'archéologie de Bretagne et de la Société d'émulation des Côtes-d'Armor.

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  • enquête thématique régionale, Inventaire des fortifications littorales de Bretagne
  • enquête thématique régionale, Inventaire des héritages militaires en Bretagne
Monument commémoratif de la prise d'Alger en 1830 dit La Consulaire, Arsenal (Brest)
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Bretagne - Brest Centre
  • Hydrographies La Penfeld
  • Commune Brest
  • Lieu-dit Arsenal, Quai sur la Penfeld
  • Dénominations
    monument

Ce monument est érigé à Brest en 1833 pour commémorer la prise d'Alger par les Français le 5 juillet 1830. Entouré d'une grille, il se compose d’un grand tube de canon en bronze - ramené d’Alger - érigé à la verticale sur un socle orné de quatre bas-reliefs à la gloire de la France.

A Alger, ce canon du 16e siècle en bronze est appelé Baba Merzoug, littéralement, "papa fortuné", mais cette expression désignait d'une manière générale les grands canons. Le premier à en faire le nom propre du canon est Albert Devoulx en 1872.

Appelé en France "La Consulaire", le canon - intégré dans un monument commémoratif - doit son nom au fait qu’il aurait servi en 1683 à supplicier le consul de France, le père Jean Le Vacher, vicaire apostolique d’Alger, en représailles du bombardement d’Alger par l’amiral Duquesne. A cette époque, la Régence d’Alger forme avec Tunis et Tripoli les États barbaresques d’Afrique du Nord, vassaux de l’empire ottoman.

L’histoire de ce canon, devenu monument, est chargée de différentes mémoires : française, coloniale et algérienne relevant de l'histoire, de légendes ou du roman historique. Son retour à Alger est tour à tour souhaité par des colons français au début du 20e siècle et au 21e siècle par les Algériens eux-mêmes.

S’agissait-il en 1830 d’un canon encore actif (En 1816, il est encore employé pour tirer contre la flotte britannique et néerlandaise) ou d’un canon inactif, chargé d’une forte charge affective et mémorielle et qui dans ce cas devrait être restitué à son pays d'origine ? (Son pays d’origine n’est pas l’Algérie, mais la Turquie, puisqu’il a été fondu à Istanbul).

Intégré dans un monument, La Consulaire rappelle le rôle de la France dans la colonisation et la Guerre d'Algérie. Le rapport remis en 2021 par Benjamin Stora préconise une étude historique du canon et la "formulation de propositions partagées quant à son avenir, respectueuses de la charge mémorielle qu’il porte des deux côtés de la Méditerranée". Un reportage d'Arte a été consacré à cette histoire en 2022 : "Le canon de Baba Merzoug, France Algérie, une histoire explosive".

Créé en 2008, ce dossier d'Inventaire a été mis à jour en juin 2024 dans le cadre de l'Inventaire des héritages militaires avec l'aide précieuse de Jacques Le Goualher (voir bibliographie).

Ce canon du 16e siècle, appelé en arabe Baba Merzoug, littéralement, "papa fortuné", a été pris par les Français lors de la prise d’Alger en 1830 contre la Régence d'Alger. C’est l'amiral Victor-Guy Duperré, commandant de l'escadre française sous les ordres du comte de Bourmont et ancien préfet maritime de Brest qui demande que ce canon, destiné à l'hôtel des Invalides à Paris, soit envoyé dans la ville-arsenal de Brest.

Trophée de guerre, le tube du canon sert de base en 1833 à un monument pour commémorer la prise d’Alger par les Français le 5 juillet 1830. Le monument est érigé rive gauche, sur les quais le long de la Penfeld, face au magasin général de l'arsenal. Selon l’inscription du socle, il fut inauguré le 27 juillet 1833, pour le 150e anniversaire du lynchage du consul Jean Le Vacher.

Ses bas-reliefs seraient l’œuvre du sculpteur Bernard Gabriel Seurre dit Seurre aîné (1795-1867) ou de son frère Charles Émile Seurre, dit Seurre jeune (1798-1858). L’inscription mentionne : Louis Philippe, roi des Français de 1830 à 1848 ; Victor Guy Duperré, commandant de la flotte française lors de l’expédition d’Alger, fait ensuite "pair de France" ; Henri de Rigny, ministre de la Marine et Jacques Bergeret, préfet maritime de Brest en 1833.

En 1837, un coq aux ailes déployées (symbole de la France sous la Monarchie de juillet), posant sa patte sur un boulet, est ajouté au monument.

Des modèles en bois des bas-reliefs (Lors de leur exposition à Brest en 2009, le Musée national de la Marine à Brest avaient présentés ces panneaux comme les matrices des bas-reliefs), du coq tenant un boulet sous sa patte sont conservées au Musée national de la Marine à Paris.

Le musée national de la Marine de Toulon conserve un modèle réduit du canon nommé La Consulaire daté de 1830 sur un affût.

D’autres pièces d’artillerie ont été prises par les Français à Alger en 1830 (Alger était défendue par 1882 pièces d’artillerie, dont 960 de bronze) : certaines pièces sont visibles au musée de l'Armée - Hôtel National des Invalides, tandis que d’autres ont été fondues en 1844 pour fabriquer la statue équestre du duc d’Orléans, fils aîné du roi Louis-Philippe qui s'est illustré dans la conquête de l'Algérie. Cette statue est érigée en 1845 place du Gouvernement à Alger, rapatriée en France après l'indépendance de l'Algérie, puis implantée à Neuilly en 1974.

Implanté sur le quai, le long de la Penfeld à Brest, près du bassin Tourville dans l'arsenal, cet édifice de type colonne commémorative se compose d’un grand tube de canon érigé à la verticale sur un socle orné de quatre bas-reliefs. Quatre canons de petit calibre et une grille circulaire en bronze, posés sur une margelle en granite protègent le monument.

Le socle est en granite gris de l'Aber-Ildut.

Le tube du canon en bronze, d’un calibre de 27 centimètres, avec un évasement de 32,5 centimètres à la bouche, mesure 6,58 m de longueur pour un poids de 11,9 t (210 kantars). Il possède deux anses, dont on a enlevé les anneaux et deux tenons côté culasse. Il est doté d'une inscription en caractères arabes qui atteste de la véritable origine et de la datation de ce basilic : "es-Sultan Selim Khan" ("السُلطان سَليم خَان"). Cette inscription et les caractéristiques de cette pièce prouvent qu’il s’agit de l’un des huit grands basilics (bacaluşka) fondus à Istanbul (Pera) en 1517-1519 pour les campagnes militaires de Selim Ier.

Le tube est surmonté d’un coq aux ailes déployées, tenant sous une patte un boulet du canon.

Les bas-reliefs, également en bronze, figurent :

- au nord : la Marine avec pour attributs, une ancre de marine, un gouvernail, un trident, une hache d'abordage, des espars et des pavillons...

- au sud : l´Armée avec pour attributs un canon de campagne sur son affût, une cuirasse, un casque avec cimier, un tas de boulets de canon en pyramide, un tambour, des piques et armes d’hast, une hache, des fusils et des pavillons...

- à l'ouest : une allégorie de la France, éclairée par les rayons des bienfaits de la civilisation tendant la main à l'Afrique. La femme blanche, couronnée et richement vêtue, assise sur un fauteuil tend la main à une femme noire, en partie dénudée, pieds nus et accroupie. Au pied de la femme noire et derrière elle sont figurés du blé (reconnaissable à ses épis), des fruits exotiques et des palmiers.

- à l´est, on peut lire l´inscription suivante sur une plaque également en bronze :

"La Consulaire,

prise à Alger le 5 juillet 1830,

jour de la conquête de cette ville par les Armées Françaises,

L'A. B.on Duperré commandant l'escadre.

Érigée le 27 juillet 1833.

S. M. Louis Philippe régnant,

le V. A. C.te de Rigny ministre de la Marine,

le V. A. Bergeret préfet maritime".

  • Murs
    • granite pierre de taille
    • bronze
  • État de conservation
    état moyen
  • Techniques
    • fonderie
  • Statut de la propriété
    propriété de l'Etat
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler, vestiges de guerre
  • Éléments remarquables
    monument

De tous les grands basilics qui furent fondus en Europe occidentale et dans l’Empire ottoman au 16e siècle, c’est le seul que l’on puisse encore voir. Les autres ont été refondus pour en réutiliser le bronze (Jacques Le Goualher).

Bibliographie

  • PREAUX, Auguste-Jean-Maurice (lieutenant-colonel). "La Consulaire" in La France Maritime. Paris, chez Postel, libraire-éditeur, t. 2, 1837.

    p. 84-85
  • BABACI, Belkacem. L’Épopée de Baba Merzoug. Le canon d’Alger. Édition Colorset, 2012.

Périodiques

  • KLEIN, Henri. "Les canons d’Alger" in Les Feuillets d'El-Djezaïr, volume 5, 1913. Souvenirs de l'ancien et du nouvel Alger.

    p. 45-51
  • Le GOUALHER, Jacques. "La Consulaire. Du grand canon de la Régence turque d’Alger au monument de Brest". Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest, tome 129, n° 4, 2022.

    p. 27-59

Documents figurés

  • Fi. Documents Figurés. 1Fi. Photographies : format supérieur à 24 x 30 cm. Photographie, 4e quart 19e siècle, vers 1880.

    Archives municipales et communautaires de Brest : 1Fi00073

Annexes

  • "La Consulaire" par Auguste-Jean-Maurice Preaux (lieutenant-colonel), 1837
Date(s) d'enquête : 2008; Date(s) de rédaction : 2008, 2024
(c) Région Bretagne
Lécuillier Guillaume
Lécuillier Guillaume

Chargé d'études d'Inventaire du patrimoine à la Région Bretagne.

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Le Goualher Jacques
Le Goualher Jacques

Historien briochin, auteur de nombreux travaux sur la ville. Il est membre du Centre de recherches et de documentation sur le monachisme celtique, de la Société d'histoire et d'archéologie de Bretagne et de la Société d'émulation des Côtes-d'Armor.

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