Photographe à l'Inventaire
- enquête thématique régionale, Lycées en Bretagne
Dossier non géolocalisé
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Aire d'étude et canton
Bretagne
La "cité scolaire polyvalente" de Fougères regroupe aujourd'hui un lycée général et technologique et un lycée professionnel.
Le premier s'est implanté dans les bâtiments de l'ancien hospice municipal, construits, à la fin des années 1930, par l'architecte Albert Hec (1900-1965). En 1966, malgré son décès l'année précédente, le nom de ce dernier figure encore sur les plans des deux extensions cosignés par Roger Besnard : la première, sur le même site, pour héberger le "lycée classique et moderne mixte", la seconde, sur un autre site, pour accueillir le "lycée professionnel mixte".
La décoration du lycée au titre du 1% artistique est composée de deux sculptures en granite et d'un décor mural.
Le décor mural a été commandé au peintre Georges Pichon, en 1969. Il a aujourd'hui disparu, probablement masqué.
La sculpture du lycée général et technologique est de Francis Pellerin. Commandée en 1975, elle est réalisée en 1976.
La sculpture du lycée technique est signée d'Hélier Pellerin et Lise Mazo, a été approuvée par la commission nationale du 1%, en 1977.
L'approbation de ce programme a ainsi nécessité trois réunions de la commission nationale du 1%, entre 1969 et 1977. Ce dossier est un exemple très intéressant sur le processus de la commande publique en ce qu'il révèle les avis très affirmés des inspecteurs de la création artistique, leur volonté de diversifier les propositions, la persévérance de l'architecte, l'importance du réseau de l'école des beaux-arts de Rennes...
Le lycée a consacré, en 2018, une exposition à Francis et Hélier Pellerin, installée avec l'aide de second.
La chapelle de l'ancien hospice civil est elle aussi richement décorée, de fresques et d'un chemin de croix de Théophile Lemonnier, présentés dans un autre dossier.
HISTORIQUE
La réalisation du programme de décoration du "lycée classique et moderne" et du "lycée professionnel" de Fougères n'a pas été un long fleuve tranquille. Dix années séparent les premiers avis et la troisième réunion de la commission nationale des travaux de décoration des édifices publics, qui donne son accord à la seconde sculpture, destinée au lycée professionnel.
Cette décoration est composée de deux sculptures en granite, une première de Francis Pellerin, premier grand prix de Rome de sculpture en 1944, et habitué de la commande publique destinée à la Bretagne et une seconde d'Hélier Pellerin associé à l'assistante du "maître" à l'école des beaux-arts de Rennes : Lise Mazo. Un autre artiste, le peintre Georges Pichon (1920), premier grand prix de Rome de peinture en 1944, a été agréé dès le 11 février 1969, pour une décoration murale dans un foyer de l'internat du lycée professionnel tandis qu'un second peintre, Jacques Durand-Henriot, a été récusé.
Le crédit total s'élève à 160763 francs.
Cette histoire montre que la commission nationale du 1% sait refuser certaines propositions des architectes, mais que l'insistance de ces derniers, sur la durée, et la force des réseaux a parfois raison des appréciations sévères des inspecteurs généraux de la création artistique.
La chronologie de l'agrément des artistes se divise en 3 étapes principales :
1- la commission, réunie le 11 février 1969, examine la première proposition de l'architecte Roger Besnard (son confrère Albert Hec, est décédé en 1965, mais il est l'auteur des premiers plans de 1964 et son nom reste associé aux plans de 1966), à savoir : une sculpture et une décoration murale pour chacun des établissements. Francis Pellerin était pressenti pour les deux sculptures, Georges Pichon et Jacques Durand-Henriot, pour les décorations murales. Malgré les nombreux avis favorables émis entre juin 1967 et octobre 1968 (architecte des bâtiments de France, inspection générale de la région Bretagne, comité départemental des constructions scolaires, recteur, inspecteur d'académie et conseil général des bâtiments de France - qui discute seulement l'emplacement d'une décoration murale), la commission donne son agrément à la seule décoration murale de Georges Pichon (coût 28 448 F) et demande aux architectes de présenter de nouvelles propositions.
2- la commission du 11 décembre 1975 s'étonne que l'architecte n'ait pas tenu compte de ses recommandations et ait proposé à nouveau deux sculptures de Francis Pellerin. L'inspecteur général Jean-Pierre Poggi, rapporteur, rappelle : "Je ne comprends pas les raisons qui ont poussées (sic !) l'architecte à confier les deux emplacements au même artiste alors que le précédent examen avait conduit la commission à suggérer qu'il soit fait appel à deux artistes. Sans être désagréable les deux projets me paraissent banalement décoratifs". Par un vote de 6 voix contre une, la commission se prononce pour que le sculpteur ne réalise qu'une seule œuvre et, dans un second vote, elle choisit celle proposée pour le lycée technique, par 4 voix contre 3. C'est pourtant in fine la sculpture du lycée classique qui est réalisée Francis Pellerin (coût 71 500 F) .
3- la commission du 27 avril 1977 approuve la dernière proposition de l'architecte, celle d'une sculpture pour le lycée professionnel, d'après une maquette étudiée par Hélier Pellerin, Lise Mazo et Marcel Dinahet. Ce dernier écrira in fine que bien qu'agréé, il n'a pas participé à ce travail (lettre du 22 avril 1977). Le crédit disponible pour cette dernière œuvre était de 60 815 F.
Ce dossier permet de mesurer le rôle des inspecteurs généraux de la création artistique dont les avis sont parfois succulents. Mais la commission sait aussi transiger.
Un des inspecteurs, Germain Viatte, rapporteur en 1969, a un avis tranché à propos de Francis Pellerin, qu'il exprime dès 1969 : "deux projets m'ont été présentés par l'artiste aujourd'hui. Intéressants et bien conçus, me semble-t-il ; un peu "ennuyeux", mais de belle tenue sculpturale et monumentale. On peut seulement souhaiter que l'artiste ne soit pas considéré comme "le sculpteur officiel breton". Cette année-là, le musée des Beaux-Arts de Rennes consacrait une exposition à l’œuvre de ce sculpteur...
Le compte-rendu de la commission du 11 décembre 1975 insiste : " en raison de l'importance du crédit alloué [il est souhaitable que] le programme décoratif soit de grande qualité et comporte, en outre, des décorations formelles très différentes afin de mieux sensibiliser les adolescents à la variété des formes d'expression de l'art contemporain."
Ainsi, à deux reprises et près de 7 ans d'intervalle, la commission persévère afin d'éviter que Francis Pellerin réalise les deux sculptures. Elle ne réussit cependant pas à éviter que son fils Hélier (sous le pseudonyme Francis Hélier !) et son assistante Lise Mazo réalisent la seconde. Rien ne laisse en effet apparaître qu'au ministère la relation de ses trois artistes soit connue. Elle n'évite pas, non plus que les deux sculptures soit issues du même "alphabet".
Compte-tenu de l'insistance de l'architecte, qui avait souligné en commission, le 27 avril 1977, que le lycée était ouvert depuis fort longtemps et le proviseur d'accord avec le projet, la commission devait en effet "ne pas s'opposer" à la réalisation de cette sculpture. Le rapport de l'inspecteur Jean-Pierre Poggi était pourtant peu amène : "Projet sans véritable originalité plastique issue d'un discours personnel ! De plus l'avis de l'inspecteur d'académie mérite d'être lu..." Ce dernier, dans un courrier du 9 février 1977, avait en effet souligné :" l'aspect viril du projet ne manquera pas d'être évoqué par les élèves..."
Les réserves des inspecteurs de la création artistique que révèle ce dossier n'ont par ailleurs pas empêché Francis Pellerin de réaliser une trentaine d'œuvres au titre du 1%, en Bretagne, dans des universités, lycées, collèges, groupes scolaires. Plusieurs architectes semblent l'avoir particulièrement soutenu. C'est entre autres le cas de Louis Arretche ou André Remondet, mais aussi des Bretons Albert Hec, Roger Besnard, Pierre-Jack Laloy et surtout du Morbihannais Yves Guillou, architecte si prolixe en bâtiments scolaires. La commission a pour autant été tenace à au moins une autre occasion. En 1971, elle avait ainsi refusé la proposition de ce dernier de confier la décoration de la cité scolaire du Porzou, à Concarneau, à Francis Pellerin.
Cette affaire montre également la place des réseaux dans les propositions d'artistes pour le 1%.
Les acteurs ayant des liens avec l’École des Beaux-Arts de Rennes sont omniprésents dans ce dossier. La commission a certes récusé, en 1969, la proposition de Jacques Durand-Henriot, pour plusieurs panneaux de céramique à placer dans les différents réfectoires (les archives nationales conservent les maquettes de ses projets, reproduites en illustration de ce dossier). Ce faisant, elle refusait un artiste d'une certaine notoriété, professeur à l’École des Beaux-Arts de Rennes, depuis 1952, deux ans avant qu'il en prenne la direction pour 17 années.
N'en demeure pas moins que la plupart des acteurs du dossier sont ou ont été élève, professeur, chef d'atelier voire directeur de l'école des Beaux Arts de Rennes ou de l’École régionale d'architecture qui y était hébergée. En 1939, lors de la construction de l'hospice civil de la Chesnardière, qui abrite aujourd'hui un internat du lycée, l'architecte Albert Hec avait déjà fait appel au peintre Théophile Lemonnier pour décorer la chapelle. C'était également un de ses collègues professeurs de l’École des Beaux de Rennes.
Recoupant le précédent, un autre réseau se manifeste ici, mais ce n'est pas une surprise : celui des grands prix de Rome. Ceux de 1944 étant, pour ce programme de décoration, particulièrement mis à contribution.
DESCRIPTION
Panneau mural de Georges Pichon
Selon le compte-rendu du comité départemental des constructions scolaires, du 27 mars 1968 :
"Le panneau décoratif mural exécuté en céramique sera situé dans le foyer du bâtiment "internat" et aura pour thème "hommage à la technique". Symbolisant les différentes disciplines de l'enseignement : feu, électricité, machine, il sera composé d'éléments variés scellés au mur à l'aide de ciment noir, le tout sous-divisé en compartiments à joints creux destinés à rattacher l'ensemble dans l'architecture générale."
Cette décoration murale n'est actuellement plus visible. Elle semble avoir été masquée lors d'une restructuration.
Sculpture du lycée général et technologique (Francis Pellerin)
Le mémoire remis par l'architecte le 25 septembre 1975, et cosigné du sculpteur indique :
"Dans la perspective de l'Entrée du Bd Ed Roussin, en un point de cette grande pelouse comprise entre le Restaurant et les anciens bâtiments, nous avons situé une sculpture en ronde bosse.
Compte tenu de l'environnement, de ce que le restaurant draine de densité humaine, l’œuvre aux contours très dessinés, conjugue la pelouse en longueur.
Nous avons choisi de nous exprimer dans un matériau du Pays ; fondant notre projet sur la maîtrise du métier et des contraintes afférentes à un matériau noble, le Granit travaillé à la pointe (smillage).
L'échelle est calculée par rapport à un personnage de 1 m 70, et répond à l'espace en question.
Ancrage dans [une] semelle de béton; sans problème de stabilité.
Le crédit de 71 500 francs est nécessaire à cette opération. Il comprend, les études, maquette et modèles, la fourniture des matériaux, réalisation et modèles, transport, échafaudages, grutage, mise en place, décharge honoraires architectes 4%, fondations.
NB :
a/ Le crédit n'est pas revalorisable, déprécié depuis qu'il est dégagé, se déprécie au rythme actuel de la monnaie.
b/ D'où la nécessité d’accélérer le processus d'établissement du Marché"
Sculpture du lycée professionnel (Hélier Pellerin, Lise Mazo)
La description fournie par l'architecte en vue de la commission de 1977, et cosignée par les artistes reprend le même schéma descriptif, à quelques nuances près :
"Sculpture en "ronde-bosse (...) en granite breton (...) de 3,2 X 1,15 X 0,85 m."
" - De l'entrée principale, la perspective atteint la campagne environnante. (...)
- Compte-tenu de l'environnement et du fait que l'internat et les ateliers, drainent une densité humaine importante, nous avons conçu un volume vertical d'une écriture très affirmée.
- La réalisation est envisagée dans le matériau du pays, le granit, qui serait smillé, c'est à dire laissé sous le travail de la pointe.
- L'échelle a été calculée par rapport à un personnage de 1,70M. et répond à l'espace en question.
- Poids : environ 6 Tonnes 500.
- Ancrage dans semelle béton, sans problème de stabilité.
- Le crédit de 60.815,00 Frs est nécessaire à cette opération.
Il comprend les études, squelettes et modèles, la fourniture des matériaux, réalisation, transports, échafaudage, grutage, mise en place des fondations, ainsi que les honoraires d'Architecte."
Le musée des Beaux-Arts de Rennes conserve des oeuvres et document de Francis Pellerin. Parmi eux, des planches intitulées "Alphabet de signes ou Les dénominateurs". Les deux sculptures correspondent à deux items de cet alphabet : "Omé" et "Galgo".
Outre ces décorations, une sculpture métallique de Jean-Pierre Waeckel, "la vache qui rouille", offerte par l'artiste, a été installée en 2006, dans une cage devant la façade sud-est du CDI, au lycée général et technologique. Elle était implantée en ville auparavant.
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Auteur(s)
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Auteur :
Pellerin FrancisPellerin Francis
Sculpteur installé à Rennes, Premier Grand Prix de Rome en 1944, professeur de sculpture à l'école des Beaux-Arts et à l'Ecole d'Architecture de Rennes. Auteur de 30 à 40 "1%", essentiellement en Bretagne.
- Auteur :
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Auteur :
- (c) Région Bretagne
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Documents d'archives
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Archives Nationales : 19880466/119. Ministère de la culture, Dossier sur 1% artistique des lycées Jean Guéhenno de Fougères, 1969-1977
Bibliographie
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BRANCHEREAU, Jean-Pierre, CROIX, Alain, GUYVARC'H, Didier, PANFILI, Didier. Dictionnaire des lycées publics de Bretagne. Geriadur liseoù publik Breizh. Histoire, culture, patrimoine, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2012, 656 p.
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Hottin [Christian] Et Roullier [Clothilde], Un art d’État ? Commandes publiques aux artistes plasticiens, 1945-1965, Rennes, PUR, 2017, 257p.
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Bonnet [Philippe], Une amitié artistique : Yves Guillou et Francis Pellerin, Bulletin de liaison de l'AMAB (Archives Modernes d'Architecture de Bretagne), N° 12, juin 2004, p. 13.
-
Imbernon Laurence, Francis Pellerin (1915-1998), catalogue de l'exposition au Musée des beaux-arts de Rennes, Rennes, 2005, 144 p.
Chargé d'études à l'Inventaire
Lycée Jean Guéhenno, 11 rue du Champ Rossignol (Fougères)
Adresse : 11 rue du Champ Rossignol
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