Les conditions de l’enquête
Dans le cadre de ses missions, le service de l'Inventaire du patrimoine culturel de la Région Bretagne a mis en en œuvre sur le territoire de projet du futur parc Régional Rance-Côte d’Émeraude, un recensement du patrimoine bâti puis une sélection raisonnée de certains bâtiments ou ensembles patrimoniaux. L’enquête sur le patrimoine de la commune de Léhon réalisée à partir du mois de mai 2013 s’intègre à cette étude générale visant à révéler les éléments bâtis – publics et privés - qui présentent un intérêt patrimonial. Ainsi, à partir de ce travail de recollement et de sélection des thématiques de valorisation sont progressivement proposées.
Le patrimoine du bourg
La commune de Léhon, au sud de Dinan, est singulière et attachante par la qualité de son site et de son patrimoine architectural. Le bourg lové dans un méandre de la rive gauche de la Rance s’est développé à partir d’une abbaye fondée dès le 9e siècle dédiée à Saint Magloire, évêque de Dol, et au pied d’une forteresse assise sur un promontoire rocheux dont l’histoire fut mouvementée. Le château subit plusieurs assauts tantôt à l’occasion des luttes entre les grands féodaux de la région, tantôt lors des guerres franco-anglaises : en 1034, 1169, 1359 et 1380, il est assiégé et pris. Un texte de 1490 le qualifie de « ruineux ». Vendu comme bien national en 1791, il est peu à peu démantelé. Les restaurations récentes : stabilisation et consolidation des ruines ont permis de promouvoir le site et de rendre hommage à « ses murailles altières », témoins de l’histoire féodale de la Bretagne.
Quant aux différents bâtiments de l’abbaye, ils rendent compte de multiples campagnes de travaux. L’église abbatiale très restaurée à la fin du 19e siècle s’inspire pour son voûtement des premières expériences angevines, elle est édifiée entre la fin du 12e siècle et le premiers tiers du 13 siècle. Elle était probablement fortifiée comme l’indiquent les vestiges d’anciens arcs mâchicoulis. Le réfectoire de la première moitié du 13e siècle est un témoin majeur de la diffusion en Bretagne du gothique rayonnant. Il a été restauré par les monuments historiques entre 1987 et 1991. Les volumes initiaux ont été restitués ainsi qu’une partie du décor mural peint du Moyen Age. La chaire du lecteur intégrée au fenestrage est une réalisation du 14e siècle des plus remarquables. Mémorables sont également les vitraux contemporains réalisés par Gérard Lardeur qui finalisent avec adresse la restauration du réfectoire. Le cloître et les bâtiments conventuels sont reconstruits par les mauristes vers les années 1670. Ils reprennent le style plus austère de cette période : piles carrées sobrement moulurées et arcades en plein-cintre non ornées, pour le cloitre, et au droit des fenêtres des bâtiments conventuels, d' élégantes lucarnes à fronton courbe ou triangulaire, forment les seuls ornements ostensibles des façades, autrefois enduites.
La plupart des maisons du bourg sont également reconstruites pendant cette période des grands travaux monastiques. Plusieurs dates portées précisent des aménagements et installations au 18e siècle : 1705, 1749, 1766. Les maisons à boutique, reconnaissables à l’appui saillant de leur fenêtre extérieure, se regroupent dans la grande rue, unique artère commerçante. De nombreux marchands et tisserands sont attestés pendant cette période de prospérité.
Les écarts (villages et hameaux)
En dehors du bourg, l’habitat est relativement dispersé sur la commune, seul le hameau du Saint-Esprit forme un regroupement significatif d’habitat ancien. Léhon a eu du mal à résister à l’extension urbaine de Dinan et de nombreux lotissements sont venus mités la campagne, le long de la route de Saint-Carné et en limite de commune en bordure de la Croix de Pierre vers la Barrière et le clos Gastel.
Parmi les plus anciens logis de la commune, ceux de la Marotais, de la Basse Gatinais, de L’Echapt, de la Renardière et du Haut Eclair se distinguent par la préservation de leur environnement, cour close de murs à la Basse Gâtinais, chemins bocagers à la Marotais, ou encore parcs et jardins à l’anglaise à l’Echapt et à la Foresterie. C’est ce cadre paysager verdoyant des bords de Rance et ses ressources qui seront mises en avant lors de l’implantation, en 1836, au nord de la commune, de l’hôpital psychiatrique Saint-Jean de Dieu. « Quoique placé sur un plateau élevé, il possède d’abondantes sources d’une eau limpide et salubre ; des carrières d’un superbe granit ; un vaste terrain, presque en friche, à rendre à la culture, ce qui fournit les moyens d’employer les bras des malades encore capables de travailler, et est pour eux, tout à la fois une distraction et un exercice salutaire. Le site est pittoresque, riant, accidenté, la vue étendue et la ville, quoique distante d’un kilomètre à peu près, est presque sous les yeux. ». (Charles Néel de la Vigne, 1850, sous-préfet des Côtes-du-Nord).