Dossier d’œuvre architecture IA22132855 | Réalisé par
Lécuillier Guillaume (Contributeur)
Lécuillier Guillaume

Chargé d'études d'Inventaire du patrimoine à la Région Bretagne.

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  • inventaire topographique, Lannion-Trégor Communauté
Hôtel dit "prébende Laënnec", 20 rue des Perderies (Tréguier)
Œuvre étudiée

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Schéma de cohérence territoriale du Trégor - Tréguier
  • Commune Tréguier
  • Adresse 20 rue des Perdreries (Perderies)
  • Dénominations
    hôtel
  • Parties constituantes non étudiées
    cour, puits

Surnommé à tort le "Vieil évêché", cet hôtel particulier a été identifié comme maison prébendale (maison de chanoine) grâce au plan de la pompe de Tréguier daté 1605 et au procès-verbal de 1791.

L'analyse architecturale croisée avec la lecture des archives permet de comprendre la distribution de cet édifice complexe des 16e et 17e siècles, privé de sa moitié est au 19e siècle. Outre son portail gothique, l'originalité de son organisation intérieure et ses nombreux éléments de confort témoignent du statut élevé de ses commanditaires : vaste vestibule traversant, passe-plats, fenêtre d'angle, coussièges dans l'escalier nord pour jouir d'une vue imprenable sur le Gunidy... C'est sans doute son dernier détenteur, Michel Laënnec de Penticou, chanoine théologal de 1788 à la Révolution, qui lui vaut d'être également appelé "La Théologale". En réalité, l'ancienne théologale se trouvait sur la parcelle voisine, détruite dans la seconde moitié du 19e siècle pour construire l'hôtel actuel de la Tour (n°18 rue des Perderies).

En 1924, c'est uniquement le portail gothique du "Vieil évêché" qui est classé au titre des Monuments historiques.

Façades et toitures sont inscrites au titre des Monuments historiques en 1973.

Situé à l’entrée occidentale de la ville à la fin du Moyen Age, l'hôtel marque le début de la rue des Perderies qui se poursuit jusqu’à la cathédrale Saint-Tugdual via la rue Colvestre. La demeure offre à la fois un panorama sur la ville et sur le Guindy situé au nord. Elle était environnée à l'ouest d'une cour bordée de hauts murs et d'un portail voûté. De grandes parcelles au nord formaient un vaste jardin. Dans le procès-verbal de 1791, elle est dénommée "prébende Laënnec" du nom de son dernier détenteur, Michel Laënnec de Penticou, chanoine du chapitre de Tréguier de 1787 à la Révolution.

Le grand corps de logis sur rue est probablement construit au début du 16e siècle pour un dignitaire du chapitre, voire pour deux dignitaires, à en juger sa taille initiale et la présence de deux blasons martelés sculptés au-dessus du portail d'entrée. L'hôtel était en effet plus grand à l'origine, sa moitié est - salle et chambres au-dessus - ayant été détruite après 1834 (cf. cadastre ancien).

Sur une poutre du logis, on peut voir un blason "de sable fretté d'or de six pièces" identifié comme celui de la famille de Guermeur (de Kermeur). Sur l'angle sud-ouest, un autre blason (bûché), soutenu par deux petites têtes humaines, est orienté vers l'entrée de la rue des Perderies. Il n’est pas exclu que le portail gothique puisse provenir de l’ancien manoir épiscopal détruit pendant les Guerres de la Ligne, ce qui expliquerait l'appellation de "Vieil évêché" donné à tort à l'édifice.

Dans le premier quart du 17e siècle, l'hôtel est agrandi d'une aile en retour au nord, flanquée d'une tourelle d'escalier à l'ouest, autrefois surmontée d'une pièce haute en pan de bois revêtue d'ardoise (cf. procès-verbal de 1791). Cette aile est probablement commanditée par le chanoine trésorier Philippe du Halgouët, cousin de l’évêque, dont le nom est inscrit à cet emplacement sur le plan de la pompe de Tréguier daté 1605 : la conduite d'eau de la pompe passait en effet par le "Verger de messire du Halegoat come chanoene". Sur l'élévation est, la porte en plein cintre, donnant sur la cour nord, est surmontée d'un blason muet, peut-être celui de Philippe du Halgouët.

Vendu comme bien national à la Révolution, l'hôtel est acheté par Jean-Marie Le Bouder en 1795. Selon les états de section du cadastre ancien, il appartient en 1835 pour moitié à "Roquefeuil Jérôme, la veuve à Tréguier" et à "Le Pape François, la veuve". Il est constitué des parcelles n° 93, n° 94 et n° 95. Léocadie de Roquefeuil hérite et épouse le comte Gustave Le Borgne de La Tour (1814-1893), militaire, député sous le second Empire puis maire de Tréguier. Dans la seconde moitié du 19e siècle, celui-ci démolit la moitié est de l'hôtel pour construire les communs de son nouvel hôtel, dit "de la Tour".

La vente des biens de la famille "La Tour" à la ville de Tréguier est conclue les 13 et 21 avril 1961 : elle comprend deux immeubles à logements situés respectivement aux 20 et 18 rue des Perdreries, à savoir le "Vieil évêché" (sic) et l'"Hôtel de La Tour" ainsi que plusieurs parcelles de terrain pour une superficie totale d’environ 12 000 m2.

En 1968, la rue Saint-Tugdual est creusée dans la cour et le jardin de la prébende Laënnec pour rejoindre la rue Saint-François depuis la rue des Perderies. Dix immeubles à logements sociaux, dits La Tour, sont construits dans les jardins par l'architecte F. Rousseau. Ces aménagements dénaturent profondément l'environnement de l'édifice. C'est cependant dans ce contexte que façades et toitures de l'hôtel sont inscrites au titre des Monuments historiques en 1973.

Dans une ville longtemps restée centrée autour de son évêque, cette maison prébendale représente un intérêt historique majeur qu’une restauration de qualité accompagnée d’une requalification des abords pourrait venir sublimer.

  • Période(s)
    • Principale : 1er quart 16e siècle
    • Secondaire : 1ère moitié 17e siècle
    • Secondaire : 19e siècle

Hôtel à façade principale sur rue, construit en moellon de granite, de schiste et de grès. L'édifice est composé d'un grand corps de logis à deux étages, et d'une aile arrière en retour sur la cour. La surface habitable de la demeure est estimée à 580 m2.

La façade sud du grand corps de logis possède un remarquable portail gothique encadré de pinacles, surmonté d'une archivolte et d'armoiries bûchées, peut-être celles de chanoines qui ont vécu dans cette vaste demeure. Le jour situé à gauche du portail éclaire le vestibule d'entrée. Si la volumétrie des fenêtres de la façade a été modifiée, des baies conservent des traces de meneaux et traverses ainsi que des fixations de grilles au premier étage. La porte secondaire est une création tardive. Sur la façade nord donnant sur la cour arrière, les baies éclairent l'escalier et les pièces annexes.

Le plan présente un vaste vestibule traversant qui dessert la cuisine, puis la porte limitant l'accès à l'escalier et à la cour arrière. Derrière la cuisine vient se greffer une pièce annexe, sorte d'arrière-cuisine aussi profonde que la cage d'escalier. L'escalier en vis dans-oeuvre, en granit, dessert les pièces des deux étages et le grenier du comble. Un premier passe-plat ménagé dans l'angle de la cuisine vers l'escalier permet de monter les repas dans la salle haute, via un second passe-plat percé dans le mur qui la sépare d'une pièce de service au nord. Autres éléments de confort, les coussièges aménagés dans l'embrasure des fenêtres : celles de la salle haute et de la chambre du second étage, et celles des trois grandes fenêtres de l'escalier qui permettaient de s'assoir pour jouir d'une vue imprenable sur le Guindy, avant que des constructions et des arbres ne viennent boucher l'horizon.

L'aile nord sur cave est construite en retour contre le grand corps de logis avec lequel elle communique. Elle abrite trois grandes pièces superposées, desservies par une tour d'escalier quadrangulaire en hors-oeuvre. Sur l'élévation ouest, la porte d'entrée est flanquée par une petite ouverture de tir aménagée dans le mur nord de la tour d'escalier. Dans l'angle nord-est, une fenêtre ouverte dans le pan coupé, offre un point de vue latéral sur le Guindy. Elle était autrefois surmontée d'une lucarne d'angle dont on trouve la trace dans l'étage en surcroît. La grande salle du rez-de-chaussée dispose de nombreux aménagements de confort : cheminée monumentale ornée d'un blason muet, placards muraux, crédence-lavabo accostée de cavités profondes. Au premier étage, la cheminée présente des piédroits galbés, à cannelures et motifs floraux.

  • Murs
    • granite moellon
    • schiste moellon
    • grès moellon
  • Toits
    ardoise
  • Étages
    2 étages carrés, étage en surcroît
  • Élévations extérieures
    élévation ordonnancée sans travées
  • Couvertures
    • toit à longs pans
  • Escaliers
    • escalier dans-oeuvre : escalier en vis avec jour en maçonnerie
    • escalier demi-hors-oeuvre : escalier en vis avec jour en charpente
  • État de conservation
    état moyen, inégal suivant les parties
  • Techniques
    • sculpture
  • Représentations
    • armoiries, personnage profane
  • Statut de la propriété
    propriété de la commune
  • Protections
    classé MH, 1924/12/23
    inscrit MH, 1973/03/22
  • Précisions sur la protection

    Portail classé MH

    Façades et toitures inscrites MH

  • Référence MH

Documents d'archives

  • Biens confisqués sous la Révolution et liquidation par vente des biens du Clergé (biens de première origine) et des émigrés (biens de deuxième origine). Dossiers individuels des prêtres et des émigrés.

    Archives départementales des Côtes-d'Armor : 1 Q 1/33 Tréguier
  • Maison prébendale de M Laënnec, procès-verbal d’estimation des biens nationaux de première origine par Joseph-Marie Cadillan, expert commis par délibération du directoire du district de la ville de Lannion, 16 février 1791 (Archives départementales des Côtes-d’Armor, 1 Q 1, article 33, Tréguier)

    Archives départementales des Côtes-d'Armor : 1 Q 1, article 33, Tréguier
  • Immeuble La Tour, Vieil évêché ; acquisition : dossier d'acquisition des bâtiments, plans, actes notariés (1960-1961). Travaux de grosses réparations : délibérations du conseil municipal, rapport de l'architecte, dossier de demande de subvention, permis de construire, dossier de consultation des entreprises, plans, marchés, décompte définitif des travaux, 5 photographies (1968-1971) 1960-1971.

    Archives communales de Tréguier : 6M5

Bibliographie

  • GUILLOU, Adolphe (préface d'Anatole Le Braz). Essai historique sur Tréguier par un Trécorrois. F. Guyon, Saint-Brieuc, 1913 (réédition collection Monographies des villes et villages de France. Paris, 1993, 204 p.)

    Région Bretagne (Service de l'Inventaire du patrimoine culturel) : 7382
  • CHARLES, Olivier. Chanoines de Bretagne. Carrières et cultures d'une élite cléricale au siècle des Lumières. Rennes, Presses Universitaires de Rennes. 2004.

Annexes

  • Maison prébendale de M Laënnec, procès-verbal d’estimation des biens nationaux, 16 février 1791
  • Extraits des archives communales de Tréguier. Immeuble de la Tour, Vieil évêché. 6M5
Date(s) d'enquête : 2017; Date(s) de rédaction : 2017, 2020
(c) Région Bretagne
Lécuillier Guillaume
Lécuillier Guillaume

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