Dossier d’œuvre architecture IA22133199 | Réalisé par
Lécuillier Guillaume (Contributeur)
Lécuillier Guillaume

Chargé d'études d'Inventaire du patrimoine à la Région Bretagne.

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  • inventaire topographique, Lannion-Trégor Communauté
Hôtel dit "prébende Chauvel", 10 rue Colvestre (Tréguier)
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Schéma de cohérence territoriale du Trégor - Tréguier
  • Commune Tréguier
  • Adresse 10 rue Colvestre
  • Dénominations
    hôtel
  • Destinations
    maison, logement
  • Parties constituantes non étudiées
    jardin, cour, pavillon de jardin

Cet hôtel du 15e siècle construit dans le bas de la rue Colvestre, à l'ouest du palais épiscopal, a été identifié comme maison prébendale (maison de chanoine), grâce aux documents d'archives concernant sa vente comme bien national. Les blasons sculptés en divers endroits montrent que les chanoines Fleuriot et Kerguenec'h de Kericuff sont à l'origine de remaniements effectués aux 16e et 17e siècles. L'usage des différentes parties de l'hôtel nous est connu par la description du procès-verbal de 1794 (en annexe). Le corps de logis principal à pignon sur cour et tourelle d'escalier sur l'angle évoque, toutes proportions gardées, d'autres hôtels bretons, comme le prestigieux "Château Gaillard" à Vannes, construit dans les années 1430 par Jean de Malestroit, alors évêque de Nantes. La présence d'un pavillon de jardin du 16e siècle (aujourd'hui propriété du n° 12 rue Colvestre), avec vue sur le confluent, témoigne du besoin des chanoines de s'isoler au calme pour contempler la nature.

Propriété du chapitre, l'hôtel est établi en retrait de la rue Colvestre, entre cour et jardin (parcelle 236 du cadastre ancien). Dans le procès-verbal de 1794, il est dénommé "prébende Chauvel", du nom de son dernier détenteur, Joseph-Henri Chauvel-Desportes, chanoine de Tréguier de 1787 à la Révolution. Son grand corps de logis était autrefois masqué de la rue par une petite maison à boutique (parcelle 238 du cadastre ancien) qui dépendait de la prébende (et lui servait de revenu), et dont il ne subsiste que les traces d'une cheminée engagée dans le pignon du n°12. Le reste de la prébende était masqué par un mur d'enclos avec un grand portail à portes cochère et piétonne. Au début du 19e siècle, murs et portail sont démolis pour construire à la place deux immeubles avec passage d'entrée dans la cour (parcelles 237, 232).

L'hôtel forme un grand ensemble de la fin du 15e siècle, remanié à des époques différentes. Ainsi, le pignon sud du grand corps de logis est repris dans les années 1550-1560, comme en témoignent les moulures en doucine des baies (interrompues par un sifflet) et les appuis saillants moulurés. Bien que très érodé, le blason sculpté sur le linteau de la fenêtre du comble à surcroît est identique à celui sculpté sur la cheminée du pavillon de jardin, aux armes de la famille Fleuriot. Or Jacques Fleuriot est archidiacre et chanoine de Tréguier au milieu du 16e siècle. Il est donc très probable qu'il soit l'auteur de ces travaux.

Le second corps de logis édifié à l'est, perpendiculairement au grand corps de logis, est repris en sous oeuvre dans la seconde moitié du 17e siècle, comme l'attestent les grandes baies à arêtes vives et les changements de matériaux dans la maçonnerie. Trois blasons sont sculptés sur les linteaux des porte et fenêtres, l'un d'entre eux appartient à la famille de Kerguenec'h, seigneurs de Kericuff, qui blasonne : "d'argent au pin de sinople, chargé d'une pie au naturel". Cette famille figure parmi la noblesse la plus influente de Tréguier au 17e siècle. Elle compte deux chanoines au 18e siècle : Joseph-Marie de Kerguenec'h, chanoine de 1739 à 1762, pourrait avoir vécu dans cette prébende, tandis que son neveu, Yves-Jean-Marie, avait une prébende rue Saint-François, de 1760 à la Révolution.

Articulé au corps de logis secondaire, au bout à l'est, un troisième bâtiment de plan massé conserve ses caractéristiques du 15e siècle : toit à coyau, baies chanfreinées sur l'appui, pan coupé en partie basse orné d'une tête schématique.

Au fond du jardin, un petit pavillon est construit dans la seconde moitié du 16e siècle (parcelle 235 du cadastre ancien), à la même époque que les travaux engagés sur le pignon sud du grand corps de logis. Sur la fenêtre aménagée dans l'angle du soubassement se trouve un blason, aujourd'hui illisible, bien que protégé par le débord de l'arête supérieure. A l'intérieur du pavillon, le linteau de la cheminée est orné du blason de la famille Fleuriot :"d'argent aux chevrons de gueules accompagné de trois fleurs [quintefeuilles] tigées et arrachées d'azur 2 et 1".

Selon les états de section du cadastre, cette demeure appartient en 1835 à Charles Illiac ainé demeurant à Tréguier. Négociant, Charles Illiac fut maire de Tréguier de 1833 à 1848. Côté rue, un portail en ferronnerie orné du monogramme "CA" ou "GA", est installé dans la seconde moitié du 19e siècle, à l'emplacement de la petite maison à boutique. Il a été déposé en 2018 pour être restauré.

  • Période(s)
    • Principale : milieu 16e siècle, 1ère moitié 17e siècle
    • Secondaire : 4e quart 15e siècle

L'hôtel adopte un plan complexe adapté aux contraintes du parcellaire qui ne permet pas d'aligner les différentes unités bâties. Le grand corps de logis est édifié perpendiculairement à la rue Colvestre. Son pignon sur cour avec tourelle d'escalier polygonale sur l'angle, est construit en pierre de taille de granite et de schiste. Il présente une élévation à travée irrégulière où les fenêtres de l'étage et du comble à surcroît ne sont pas alignées sur celle du rez-de-chaussée. L'entrée par le pignon ouvrait sur la salle et un cabinet que prolonge un office logé dans une petite construction établie contre le pignon nord. La tourelle d'escalier polygonale sur l'angle sud-est dessert les chambres du premier étage et le comble à surcroît. Elle fait la jonction avec le second corps de logis construit à l'est, perpendiculairement au grand corps de logis. Le procès-verbal de 1794 nous apprend qu'il abritait la cuisine, ayant un potager à trois services de maçonnerie et une grande auge de pierre, surmontée d'une chambre et d'un cabinet auxquels on accède par une seconde tourelle d'escalier sur l'angle sud-est. Des latrines sont associées à cet escalier, leur conduit est visible au nord.

Articulé à cet escalier privatif, un troisième corps de logis est construit bout à l'est. Son plan massé à deux étages comprend une "cave" (cellier) surmontée de deux chambres. Sur l'angle sud-est, le pan coupé en partie basse facilitait le passage des voitures à chevaux vers le fond de la cour où se trouvaient la remise et l'écurie (parcelle 232 du cadastre ancien).

Au nord du jardin, un petit pavillon en maçonnerie et pan de bois, couvert d'un toit à quatre pans, abrite une chambre à feu construite sur un étage de soubassement assez haut pour servir de bûcher et/ou de resserre à outils. Surélevée et offrant ainsi une vue privilégiée sur le confluent, la chambre est dotée d'une cheminée soigneusement moulurée.

  • Murs
    • granite moellon
    • schiste moellon
    • grès moellon
    • bois pan de bois
  • Toits
    ardoise
  • Étages
    1 étage carré, étage de comble
  • Couvertures
    • toit à longs pans pignon découvert
    • croupe
    • toit conique
  • Escaliers
    • escalier hors-oeuvre : escalier en vis avec jour en maçonnerie
    • escalier hors-oeuvre : escalier en vis avec jour
  • État de conservation
    mauvais état, désaffecté, envahi par la végétation
  • Statut de la propriété
    propriété privée
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler
  • Éléments remarquables
    logis, manoir
  • Sites de protection
    abords d'un monument historique

L'état d'abandon de ce manoir situé en cœur de ville et à deux pas de la cathédrale Saint-Tugdual interpelle habitants, comme visiteurs de Tréguier.

Documents d'archives

  • 1 Q 1/33. Biens de première origine. Arrondissement de Lannion. Tréguier. Prébende de M. Chauvel rue Colvestre : estimation le 9 mars 1791, adjudication le 29 octobre 1793, procès-verbal les 1, 2, 3 juillet 1794.

    Archives départementales des Côtes-d'Armor : 1 Q 1/33

Documents figurés

  • Tableau d'assemblage et plans parcellaires de la commune de Tréguier, 1834.

    Archives départementales des Côtes-d'Armor : 3P 362/1-4

Annexes

  • Extrait du procès-verbal de 1794
Date(s) d'enquête : 2017; Date(s) de rédaction : 2018
(c) Région Bretagne
Lécuillier Guillaume
Lécuillier Guillaume

Chargé d'études d'Inventaire du patrimoine à la Région Bretagne.

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