Dossier thématique IA22133423 | Réalisé par
  • enquête thématique régionale, Inventaire du patrimoine culturel maritime de l'estuaire de Tréguier
La Station de Tréguier
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Dossier non géolocalisé

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    Bretagne

Depuis de nombreux siècles, le port de Tréguier pratique cabotage national et international grâce à sa rivière en eau profonde, le Jaudy, aisément navigable même par d’assez grosses unités. Le trafic commercial ne s’arrête pas à la ville épiscopale, il remonte le Jaudy sur trois kilomètres jusqu'à La Roche-Derrien, localité perchée sur un promontoire dominant la rivière sur trois côtés. Cité des teilleurs de lin, La Roche-Derrien est également une ancienne cité médiévale, place stratégique commandant le passage entre l’Armor et l’Argoat, et déjà carrefour de voies romaines.

Les deux villes sont d’ailleurs la proie d’envahisseurs venus par la mer : en 880, les Normands commandés par Hastings, pillent et brûlent la cathédrale Saint-Tugdual de Tréguier ainsi que des maisons. En 1346, ce sont les Anglais qui pillent Tréguier et La Roche-Derrien.

Colbert de Croissy visite Tréguier en 1665, et note : « La ville est siège épiscopal situé sur une rivière du même nom dont l’embouchure a une demie lieue de large gisant Nord Nord-Est, et Sud Sud-Ouest sans abri du côté d’amont, où de basse mer il ne reste que quatre pieds d’eau et quatre brasses aux marées hautes, elle est pleine de roches qui mettent une lieue en dehors, au dedans de ladite rivière sur deux lieues de longueur jusque près de la ville, il y a bon fond de trois à quatre brasses d’eau ce qui est inutile pour des vaisseaux considérables par les dangers de l’entrée. »

De son côté, le commandant Louis Lacroix confirme la facilité du port de Tréguier et de sa rivière : « Ses quais, le long desquels les navires échouent sur des posées de sable molle épaisse, offrent une profondeur de 4 mètres au moins, aux pleines mer de mortes-eaux, et la navigation de la rivière présente peu de difficultés. Par contre, l’approche par mer de l’entrée du petit fleuve est peu aisée, car toute la côte qui va du Port-Blanc aux Héaux de Bréhat est des plus dangereuses, en raison des roches qui la débordent à plusieurs milles au large ; la mer par gros temps y devient vite monstrueuse, et un voilier rafalé près de terre ne pourrait regagner le large. » (Les derniers voiliers caboteurs français)

L’entrée de Tréguier peut donc être périlleuse aux capitaines ne connaissant pas suffisamment les lieux, d’où la nécessité de demander les services d’un pilote. Venant du large, les navires doivent se méfier des Epées de Tréguier près des Héaux de Bréhat, puis des rochers des Duono, et ceux de Penn ar Guézec (Tête des Chevaux) situés devant l’île d’Er en Plougrescant. Trois passes permettent l’accès du Jaudy : la passe de la Gaine (à l’Est, longeant le Sillon de Talbert), la passe du Nord-Est, la Grande Passe (à l’Ouest, venant de Perros). La passe du Nord-est prend d’ailleurs la flèche de la cathédrale comme amer pour entrer en rivière.

Trafic portuaire

Dans les deux ports, le commerce maritime y est constitué principalement par des sorties de céréales et de pommes de terre, et des entrées de vin et sel (au Moyen-Age), et de charbon, bois et ciment aux 19e et 20e siècles. Actuellement, La Roche-Derrien n’a plus de trafic portuaire, tandis que Tréguier, qui a su développer son commerce, reçoit régulièrement des bateaux de 5 000 tonnes, au détriment des autres ports de la côte Nord, de Lannion, Perros, Lézardrieux, et même Paimpol qui n’ont plus de cabotage. Au 19e et au début du 20e siècle, Tréguier recevait également des bois scandinaves (sapin pour la construction), des graines de lin de Riga (port de la Baltique), du sel portugais.

Ce port a aussi armé quelques navires à la pêche à Islande et des navires chasseurs. Après la première guerre mondiale, Tréguier reste l’un des derniers ports bretons à armer des voiliers caboteurs qui font le trafic régulier « charbon-poteaux de mine » avec le Pays de Galles, ou le trafic de ciment depuis les ports du Nord de la France, Dunkerque et Boulogne. Ces goélettes et dundees sont armés par quelques Trégorrois et surtout par des Pleubiannais qui tenaient à avoir leurs navires inscrits aux matricules de Tréguier. Quelques uns ont laissé une réputation de grands marcheurs : l’Océanide (capitaine Nicolas), l’Hermann (capitaine Kervizic), ou la Sylvabelle (capitaine Jean-Marie Meudal).

Tarifs de pilotage

Bulletin des lois de 1830

Quartier de Paimpol, station de Tréguier

Nombre de pilotes : 2 pilotes pour le service de la rivière de Tréguier à La Roche-Derrien, et un aspirant.

Les pilotes et l’aspirant-pilote de la rivière de Tréguier feront le service depuis son embouchure jusqu'à La Roche-Derrien, réciproquement. Ces pilotes seront tenus de demeurer sur la côte de Plougrescant.

Les pilotes de la rivière de Tréguier qui se présenteront à bord des bâtiments avant leur entrée en rivière, démonteront ceux des stations voisines qui les auraient abordés en mer.

Les pilotes des stations voisines ou contiguës qui auront pris un bâtiment au large, et qui l’auront fait entrer dans les passes de la rivière, pourront le conduire au lieu de sa destination. Les dits pilotes, jusqu'à leur entrée dans les passes, seront tenus, sous peine de la perte de leur pilotage au profit des pilotes de Tréguier, de faire tenir dehors le pavillon en demande de lamaneurs de la rivière. Ils le feront amener aussitôt leur entrée dans les passes.

Pour entrer ou sortir, les bâtiments du commerce chargés ou non chargés, dans toute l’étendue de la rivière de Tréguier, il sera accordé aux pilotes les prix ci-après :

- Pour les bâtiments pris en dehors des dangers et conduits sur la rade de La roche Jaune : 4 centimes par tonneau

- De La Roche Jaune aux quais de Tréguier : 07 centimes par tonneau

- Pour tous les havres au-dessus de Tréguier : 10 centimes par tonneau

Bulletins des lois de 1837

mêmes articles, mais précision :

Les dangers ou les passes de la rivière de Tréguier commencent, pour l’entrée de la Gaine, à partir de la roche Lamoisie (Nord-Est du Sillon de Talbert en Pleubian) ; pour le grand chenal, à la roche dit bout de Renaud ; et pour la passe du château, aux roches les plus en dehors de la pointe de Plougrescant.

Décret impérial de 1857

N° 137. Nombre de pilotes :

Station de la rivière de Tréguier : 3

(Chaque station pourra avoir un aspirant-pilote)

Station du Port-Blanc : 1

N° 138. Le service du pilotage ne peut être fait qu’avec des embarcations ayant au moins six mètres de longueur, de tête en tête.

N°160. Les stations de de Port-Blanc et Tréguier s’étendent depuis la direction dans laquelle le phare des Héaux est vu par le corps de garde situé sur Creac’h ar Maout (Pleubian), jusqu'à celle dans laquelle l’île Bruc est vue par le rocher du Four (Port-Blanc).

N°165. Tarif de pilotage :

Pris en dehors des dangers et conduits sur rade de la Roche Jaune ......18 centimes par tonneau

De la Roche Jaune au quai de Tréguier, ................................................. 8 centimes par tonneau

Les droits de pilotage fixés pour l’entrée de la Roche Jaune et pour la sortie sont applicables à l’entrée et à la sortie de Port-Blanc.

Documents d'archives

  • LE PERSON, André. Manuscrit.

    Collection particulière

Bibliographie

  • THOMASSIN, Anastase. Pilote côtier, Côtes Nord de la France, troisième partie : Des Héaux de Bréhat au cap de la Hague. Paris : Challamel aîné, 1875.

    Collection particulière

Annexes

  • Chronique du Pilotage à Tréguier, dont les naufrages
  • Le pilotage à Tréguier à l’époque contemporaine
  • Liste des pilotes de Tréguier 1825-1865
Date(s) d'enquête : 2018; Date(s) de rédaction : 2019