Présentation

L’objectif de cette étude est d’interroger le lien entre prospérité toilière et chantiers paroissiaux, à travers trois communes du Centre-Bretagne. Le Bodéo, Le Quillio et Trévé sont au cœur de la manufacture dispersée des toiles « bretagnes ». Aux 17e et 18e siècles, la production de ces fines toiles de lin fait la richesse d’une zone comprise entre Saint-Brieuc et Pontivy. Elle contribue à faire de la Bretagne l’une des premières provinces toilières françaises. Si les études d’Inventaire mettent en évidence les retombées du commerce toilier sur l’architecture domestique du secteur, qu’en est-il du patrimoine religieux ? L’étude de trois communes permet d’apporter des éléments de réponses qui ne peuvent cependant être généralisés à l’ensemble de la manufacture. Leur choix s’est fait en fonction de plusieurs critères : présence d’un milieu marchand important, traces patrimoniales et archivistiques suffisantes, localisation par rapport aux cités-marchés de la manufacture. En croisant Inventaire sur le terrain, recherches en archives et publications d’historiens, l’étude apporte un nouvel éclairage sur le patrimoine religieux local qui rentre en résonance avec l’histoire économique de la région. Elle s’inscrit dans le cadre plus large d’une étude thématique sur les patrimoines liés à l’histoire toilière de la Bretagne, portée par la Région depuis 2022.  

Périmètre d’étude

La manufacture des « bretagnes » totalise, au plus fort de son expansion (entre la 2e moitié du 17e et la fin du 18e siècle), une soixantaine de paroisses et trèves. Cet espace rural de production est structuré par quatre cités-marchés aux toiles - Quintin, Uzel, Loudéac, puis Moncontour en 1757 - auxquelles sont respectivement rattachées Le Bodéo, Le Quillio et Trévé. L’étude s’attache à examiner le patrimoine religieux de ces trois communes, en documentant leur contexte de construction, afin de mettre en lumière des dynamiques liées à l’activité toilière. L’attention est portée sur les églises et leur mobilier, ainsi que sur les presbytères, chapelles et croix de chemin. Ces édifices et leurs aménagements intérieurs témoignent des choix artistiques et des moyens mis en œuvre par les élites rurales, entre la 2e moitié du 17e et le 18e siècle.

Méthodologie

L’enquête d’Inventaire se décline autour de deux axes de connaissances :

-          Une connaissance des chantiers paroissiaux et des objets mobiliers commandités grâce à l’argent de la toile

-          Une connaissance des acteurs de l’activité toilière qui ont eu un impact financier et décisionnel sur les chantiers

L’enquête s’appuie sur des documents conservés aux archives départementales des Côtes-d’Armor, notamment les fonds paroissiaux de la sous-série 20 G (registres de délibérations du général, rôles de capitation et comptes de fabrique). Elles sont enrichies par d’autres sources, telles que les registres de marques de Quintin (conservé aux archives départementales des Côtes-d’Armor) et de Saint-Malo (conservé aux archives départementales d’Ille-et-Vilaine), ainsi que par des fonds complémentaires, notamment ceux des archives municipales de Trévé (rôles de capitations et liste des citoyens actifs de 1790). Différents travaux sur l’histoire de la manufacture et des communes, ont permis une connaissance du contexte, mais aussi d’accompagner la recherche en archives : Toiles de Bretagne, la manufacture de Quintin, Uzel et Loudéac 1670-1830 de Jean Martin, mais aussi Le patrimoine religieux de la manufacture des toiles « bretagnes ». Prospérité toilière et ambition fabricienne en Centre-Bretagne (1650-1790) d’Anthony Guillemot et Pouvoir et religion au village : la vie paroissiale à Loudéac, Trévé et Saint-Caradec au XVIIIe siècle (vers 1680-1790) de Yann Lagadec.

Ce travail préalable de recherche archivistique et documentaire, s’est poursuivi avec plusieurs déplacements sur le terrain, afin de confronter les données à la réalité du terrain. Il s’est d’abord appuyé sur le recensement du patrimoine bâti et mobilier, permettant d’identifier les témoins patrimoniaux mentionnés dans les sources écrites. Cette étape a été ensuite enrichie par l’analyse du bâti et du mobilier, qui a permis de compléter la connaissance et d’élargir le corpus par l’identification de nouveaux éléments patrimoniaux.

Cette enquête a été menée par Paul-Alexis Borgo, dans le cadre de son stage de fin d'études, en Master 2 Restauration et réhabilitation du patrimoine bâti et des sites de l’Université Rennes 2, entre mai et novembre 2025.