Ce "petit" bunker - 11 m3 de béton et 600 kg de ferraillage pour le plan-type 58 mis en place en mai 1943 - est certainement le plus connu du Mur de l’Atlantique en raison du nombre important d’exemplaires construits (plusieurs milliers). Sur le terrain où il est le plus souvent totalement enterré, on le reconnaît à son ouverture circulaire caractéristique (avec ou sans collerette).
C’est un poste d’observation et de tir dit Ringstand en allemand, "position circulaire" (dénomination officielle). Il permettait aux soldats une vision à 360 degrés tout en bénéficiant d’une bonne protection car ils étaient sous le niveau du sol. Il était conçu pour un équipage théorique de deux soldats : le premier - le tireur - à l’arme portative de type mitrailleuse ou fusil, voire mortier léger (Granatwerfer 36 de calibre 5 cm), le second - le chargeur - à l’approvisionnement en munition (un troisième soldat pouvait également jouer le rôle de pourvoyeur). Ce type de bunker était utilisé pour l’observation, la défense rapprochée, le flanquement des fossés ou des murs antichars et la protection du périmètre extérieur des ensembles fortifiés. On le retrouve également employé pour la surveillance d’édifices logistiques (transport, ravitaillement ou logement des troupes).
Le plan-type 58 découle du modèle VF8, MG (abréviation de Maschinengewehr, mitrailleuse) Ringstand für 2 Mann oder Beobartung stand (ou poste d’observation) mis en place à l’automne 1942 et qui nécessitait 9,5 m3 de béton pour sa réalisation. "VF" est l’abréviation de verstärkt feldmässiger Ausbau in Beton qui désigne une construction de campagne renforcée en béton. Paradoxalement, avec 40 cm ou 60 cm d’épaisseur de béton au lieu d’un mètre, ces constructions n’auraient pas dû être considérées comme "renforcées".
Il existe deux versions du plan-type 58, version "c", 80 cm Ringstand - 8-eckig avec escalier droit et chambre de tir à la partie haute octogonale et version "d", 80 cm Ringstand - rund avec escalier oblique et chambre de tir à la partie haute circulaire. De nombreuses variantes existent cependant, tant en forme qu’en dimensions (notamment de la chambre d’abri). Certains exemplaires sont équipés d’une arrivée électrique et d’une connexion pour le téléphone.
En théorie, sa chambre d'abri (Unterschlupfraum) pouvait contenir 40 000 à 50 000 munitions (7,92 x 57 mm Mauser) ou 720 obus de mortier léger calibre 5 cm (72 caisses). Une mitrailleuse MG 34 Mauser dispose en effet d’une cadence de tir théorique de 800 à 900 coups à la minute tandis que la MG 42 dispose d’une cadence théorique de 1 200 coups à la minute avec approvisionnement par bandes de 50 et 250 coups. La portée maximum utile de ce type de mitrailleuse disposée sur trépied est comprise entre 1 000 et 1 200 mètres. Dans la chambre d’observation et de tir, deux tablettes permettaient d’accueillir les caisses à munition. Un couvercle en bois étanchéifié pouvait permettre de fermer l’ouverture circulaire.
A partir de 1943, le Ringstand est désigné Tobruk-Stand en référence aux bunkers italiens (construits avant janvier 1941) observés lors de la Capture de Tobruk par les forces de l’Axe en juin 1942. Le terme Tobruk-Stände (littéralement, position de Tobruk au pluriel) est mentionné dans les états des constructions du Mur de l’Atlantique au 1er juillet 1943 du territoire de la 7e armée l’armée du IIIe Reich conservés aux archives fédérales allemandes à Coblence.
Dans le secteur de la 7e Armée (AOK 7), de l’Orne à l’embouchure de la Loire (en incluant la rive gauche jusqu’à Préfailles) et avec les îles anglo-normandes, 3 814 Tobruk-Stände sont construits ou sont en construction au 1er janvier 1944. Dans ce secteur, plus de 7 300 emplacements ouverts pour mitrailleuse (Offene M.G.-Stände) ont également été aménagés à cette date.
En plus du plan-type 58, il existe une vingtaine de versions de Tobruk (dont certains préfabriqués) : pour mortier ou lance-grenades (Granatwerfer-Stände, 1 275 exemplaires), pour lance-flammes (Flammenwerfer-Stände, 1 250 exemplaires), pour tourelle de char avec canon et/ou mitrailleuse... Certains Ringstände étaient équipés d’un poêle voire d’un lit.
Certains bunkers de la série 600 qui est lancée en février 1942, sont également dotés d’un Tobruk intégré, nommés Offener Beobachter, poste d’observation. Il est dépourvu de chambre d'abri pour le stockage des munitions.
Chargé d'études d'Inventaire du patrimoine à la Région Bretagne.