Dossier d’œuvre architecture IA44000005 | Réalisé par
  • enquête thématique régionale, L'architecture gothique en Bretagne
Eglise Notre-Dame-de-Pitié
Œuvre étudiée

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Bretagne
  • Commune Le Croisic

La chapelle de la Bienheureuse Marie de Pitié, en faveur de laquelle Sixte IV accorde en 1482 des indulgences, renouvelées par Innocent VIII en 1486, dépendait de la paroisse Saint-Guénolé de Batz. Il s´agissait d´une chapelle d´hôpital destinée aux étrangers, dont l´emplacement différait peut-être de celui de l´église actuelle. À la fin du 15e siècle, la prospérité économique du Croisic, liée au commerce maritime, et l´essor démographique de la cité justifient la construction d´une grande église, capable d´accueillir un millier de fidèles. En 1501, Alexandre VI fait droit à la requête des habitants, arguant de l´éloignement du chef-lieu, et envoie une bulle autorisant la consécration d´une église. La chronologie du chantier, mené à terme en une trentaine d'années, est relativement bien connue. Le 4 décembre 1494, Jacques Penfau, gouverneur de l´église, pose la première pierre du pignon. Le 25 mars 1508, Mathurin de Plédran, évêque de Dol, consacre l´église. Le 2 janvier 1525, on procède à une nouvelle bénédiction de l´église, sans doute quasiment terminée, et, le lendemain, à la consécration du cimetière, situé au sud. Le 26 avril 1526, est entrepris le clocher de charpente, qu´on achève de couvrir le 26 août. En 1528, la mise en service de l´église est attestée. Le 23 août, Olivier Robin ou Robein, maître d´oeuvre, encore signalé en octobre 1529, livre le portail nord. En 1534, la cloche La Michelle est baptisée et placée dans le beffroi en charpente recouverte d´ardoise. Enfin, le 20 mars 1546, le P. Leroux consacre l´autel de la Trinité, dans le second bas-côté sud. En 1680, les notables du Croisic, constatant que la charpente du clocher est tellement pourrie qu´elle menace de tomber, décident de le reconstruire, stimulés par l´exemple du Bourg de Batz, qui possédait depuis 1677 une tour neuve. Les travaux sont menés de 1683 à 1700. Il faut attendre 1763 pour que Le Croisic soit érigé en paroisse ; un mobilier neuf est alors mis en place. Pendant la Révolution, l´édifice sert de temple républicain, de mairie, de magasin d´artillerie, si bien qu´en 1842 il nécessite d´énormes réparations dans sa toiture et ses vitraux. La restauration est entreprise par l´abbé Bigaré (1840-1879) : réfection de la couverture et des meneaux puis, à partir de 1859, pose de nouveaux vitraux. Au cours du 20e siècle, le service des Monuments historiques assure un entretien régulier de l´édifice, qui n´empêche pas le fenestrage de la grande verrière du choeur de s´effondrer en 1963.

Plan et ordonnance intérieure Le plan, irrégulier, reflète un changement de parti intervenu pendant les travaux. À l´édifice à trois vaisseaux prévu initialement, on décida d´adjoindre au sud, sans doute pour répondre à l´accroissement de la population, un bas-côté supplémentaire, dit nef de la Trinité. En outre, la décision de voûter l´église semble bien avoir été prise en cours de chantier. En témoigne, dans les combles du premier bas-côté sud, la charpente à chevrons portant ferme qui, avec ses sablières, entraits engoulés et poinçons moulurés, était de toute évidence conçue pour être vue et lambrissée. L´église présente donc quatre vaisseaux de cinq travées, sauf le second bas-côté méridional qui, venant buter contre la sacristie, n´en compte que quatre. Le vaisseau central se termine à l´est par un chevet plat, le bas-côté nord par un mur biais (à l´exemple de Saint-Aubin de Guérande et de Notre-Dame-du-Mûrier à Batz) et celui du sud par deux pans de maçonnerie formant un angle très ouvert. Les supports n´offrent aucune uniformité : piles cantonnées de colonnes polygonales, colonnes de différents diamètres. Les arcs retombent en pénétration dans les supports. Les nervures d´ogives sont en granite dans le vaisseau principal et le second bas-côté sud, en tuffeau dans les collatéraux. De plus, les deux travées occidentales du premier bas-côté sud présentent des voûtes complexes, à liernes et tiercerons et clés pendantes. Les voûtes, montées en tuffeau, deviennent de plus en plus bombées à mesure qu´on progresse vers le choeur, créant un effet illusionniste. Celles de six travées possédaient des peintures murales, exécutées à la détrempe, datées par le millésime 1550. L´édifice est largement éclairé par seize grandes baies, percées dans les murs périphériques. Ordonnance extérieure L´église est construite en grand appareil de granite, de provenance locale, acheminé par voie d´eau. L´accès privilégié se faisait par le côté nord, dont l´élévation est scandée par de puissants contreforts. Ouvrant sur l´ancienne rue de l´Hôpital, le portail nord, achevé en 1528, occupe toute la largeur de la troisième travée. Reprenant le parti du portail ouest de Notre-Dame-du-Mûrier, au Bourg de Batz, il se compose de deux portes géminées en anse de panier et d´une fenêtre en tympan inscrites dans la même embrasure à multiples ressauts, surmontée d´une accolade et d´un gâble. Le réseau en tuffeau du tympan semble avoir été très restauré, sinon refait, au 19e siècle. Sur le trumeau polygonal, couronné par un dais, un groupe également en tuffeau représente la Vierge de Pitié. Par comparaison, le portail ouest, percé dans une façade dilatée en largeur, paraît relativement modeste, d´autant qu´il est enserré entre deux contreforts massifs. Il superpose, entre deux minces pinacles, une porte en anse de panier et une fenêtre en arc brisé surmontée d´une accolade. La façade primitive, correspondant à une nef de trois vaisseaux, était épaulée par deux contreforts angulaires ; celui du sud a été partiellement noyé dans les maçonneries nouvelles lors de la construction du second bas-côté. Cantonnée de contreforts à 45° amortis par des pinacles, la tour carrée remonte au premier quart du 16e siècle, à l´exception de son dernier niveau, dont les percements, sinon les maçonneries, ont été repris à la fin du 17e siècle. On l´a alors couronnée par une balustrade classique, et on a substitué au beffroi de charpente érigé en 1526 un lanternon octogonal de pierre. L´élévation sud, qui donnait jadis sur le cimetière, présente une file de quatre pignons. Les couvertures des bas-côtés forment pénétration dans le comble du vaisseau central. Un troisième portail est ménagé de ce côté, composé d´une porte en anse-de-panier surmontée d´une fenêtre en arc brisé au réseau curvilinéaire. Reflet de la fortune du port du Croisic dans le premier quart du 16e siècle et symbole de sa volonté d´émancipation par rapport à la paroisse mère de Batz, l´église Notre-Dame-de-Pitié mérite de compter parmi les grandes églises urbaines bretonnes de la fin du Moyen Âge. Sa singularité dans le paysage architectural du temps tient à l´expansion en largeur de son volume intérieur, d´ailleurs décidée en cours de chantier avec la création d´un bas-côté supplémentaire, qui tend à inscrire son plan global dans un carré, alors que la tendance dominante est celle d´un espace longitudinal fortement éclairé par de grandes verrières à ses extrémités ouest et est. De même, le choix de doter l´édifice de voûtes de pierre, qui s´est également imposé pendant les travaux alors que le parti initial prévoyait un berceau lambrissé, va à l´encontre de ce que l´on constate par ailleurs dans nombre d´édifices de la province, où c´est au contraire la voûte qui a été abandonnée au profit du lambris de couvrement.

  • Étages
    4 vaisseaux
  • Couvrements
    • voûte d'ogives
  • Statut de la propriété
    propriété de la commune
  • Protections
    classé MH, 1906/10/25
  • Précisions sur la protection

    Eglise Notre-Dame de Pitié : classement par arrêté du 25 octobre 1906.

  • Référence MH
Date(s) d'enquête : 1992; Date(s) de rédaction : 1986
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