Dossier de présentation du mobilier IM22003405 | Réalisé par
  • inventaire préliminaire, Pléneuf-Val-André
Pêches côtières

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Communes littorales des Côtes-d'Armor - Pléneuf-Val-André

Evolution de la pêche côtière à Dahouët et Erquy : témoignage oral de Raymond Pays (Erquy)

Ancien marin-pêcheur de Erquy, Raymond Pays lorsqu'il évoque la pêche à Dahouët dans les années 1930, cite seulement la présence de quelques bateaux de pêche professionnelle dans ce port, qui pratiquaient le chalut à barre avec des bateaux de 9, 10 pieds de long, appartenant à Fouré et Morvan. Il y avait encore quelques sabliers et caboteurs armés par le Péchon ; alors que trois familles vivaient exclusivement de la pêche à Erquy : Le Cam, Rollier et Uby. Les autres marins qui sortaient occasionnellement étaient des retraités de la marine Marchande. Les métiers de la pêche avaient mauvaise réputation :

Ils crevaient la faim ; il n'y avait pas de glace, que de la fougère pour mettre sous les maquereaux ; les bateaux n'étaient pas motorisés ; tous les voiliers pêchaient les maquereaux à l'affare.

A partir de 1950, on a commencé à utiliser la drague aux praires en pêchant les oursins dans les cailloux, puis dans le sable. Les praires étaient aussi pêchées en marée d'équinoxe avec des fourches. Dans les petits fonds, on a commencé à pêcher les praires avec la drague lestée à mi-marée seulement, en traînant des orins. A basse mer, on ramassait 15 à 25 kg de praires. Les canots creux faisaient 17 pieds de long, équipés ensuite d'un petit moteur Bernard à essence de 6 chevaux. La drague devait "se visser dans le sol", la fune amarrée au mât. On ne tirait pas. On disposait de simples rouleaux sur le côté. On ne pouvait pas aller en ligne droite : 20 à 30 praires par coup de drague, de 10 minutes. Les premiers bateaux étaient construits à la Richardais (chantier Mallard) ou à Carantec pour Erquy. Le seul bateau à faire les praires à Pléneuf était celui de René Morvan, la même coque que mon "Risque tout", un 19 pieds avec grand voile aurique, flèche, foc et trinquette. Morvan était aussi pilote à Saint-Brieuc.

Un Camarétois est venu le premier faire les praires au Grand Léjon. Les premières dragues utilisées pour les "ricardiaux" n'avaient pas de dents. Les pêcheurs n'avaient pas de tapis de drague. Les premiers viendront de la rade de Brest avec la coopérative. Puis on a mis des doigts, un bout de fer rond de 10 cm, qui pliait souvent. La drague faisait 18 cm de large. On pêchait aux "Petits Chevaux", au nord de la Comtesse : 40 kg seulement la 1ère journée de pêche. Il y avait 4 bateaux : les frères Bourel de Saint-Brieuc, un bateau de Saint-Quay et le plus grand bateau d'Erquy, ponté "Le Sidi-Brahim" de Raymond Pays. Avec le pont, on pouvait rejeter le sable à la mer. L'été, les bateaux faisaient la coquille : "on rafouillait". Cependant, comme les pêcheurs avaient "bougé" les fonds, les coquilles se sont multipliées.

Raymond Pays a pu acheter une drague d'occasion à Grandcamp comme modèle, qui lui a permis de confectionner le première drague à praires "moderne", puis à coquilles Saint-Jacques. Les dragues plus lourdes lestées avec une vis de pressoir, ont été équipées de volets pour faire plonger la drague plus profond et la diriger comme un gouvernail, à la fin des années 1960.

Cependant, il a fallu attendre encore 4 ans pour que cette pêche soit rentable avec des moteurs de seulement 50 chevaux. Le terrain de pêche s'était agrandie au sud de Rohein, dans un fond où une goélette "La Pleubaniaise" avait coulé. Les marins allaient pêcher toute l'année, alternant le chalut, les praires et les coquilles Saint-Jacques. Un matelot à la fin des années 1960 gagnait dans sa semaine ce qu'un ouvrier gagnait dans son mois. Puis les dragues rivées ont été forgées par les forgerons d'Erquy (Morel et Blanchet) et Trotin de Dahouët.

La pêche côtière à la voile de l'Ancien Régime à 1914-18 En 1726, Le Masson Du Parc, inspecteur général des pesches du poisson de mer déclarait à propos des côtes Nord de Bretagne : La découverte du Nouveau Monde y a fait périr la pêche des poisons de mer. Les habitants se sont adonnés au labourage et ont tellement négligé la pesche. Il ne recensait à Dahouët que trois barques montées par 6 ou 7 hommes. Déjà en 1664, une enquête de l'Amirauté de Saint-Brieuc ne mentionnait aucun bateau de pêche pour Dahouët et Erquy. La grande pêche n'était plus si florissante. Les sécheries à congres et à lieus, régies par les seigneuries du Gué Madeuc pour Dahouët et du Penthièvre pour Erquy, étaient abandonnées. Au 16ème siècle, la pêche côtière n'était pas plus florissante. Cependant, le bornage avait remplacé la pêche pour les produits du sol et l'artisanat. Le Président de Robien en 1756 insistait sur les faibles moyens de pêche des pêcheurs : Sur la Manche et au nord de la province, où l'on ne se sert que de la seine, du trémail et de la ligne ; la drague n'y est point en usage. En 1830, Habasque trouvait quand même à Dahouët 6 barques occupées à la drague des huîtres. En 1821, les bancs naturels d'huîtres avaient été ravagés par les Cancalais, les "marchands d'orbiche". Ce sont ces coquilles de grosses huîtres appelés "pieds de cheval" qui tapissaient le bancs de vase du port ou "prayes". En 1863-1866, Cavelier de Cuverville, lieutenant de vaisseau, étudiait la pêche côtière en baie de Saint-Brieuc. Il préconisait l'emploi de bateaux pontés, plus sûrs ; ce fut probablement le départ de l'utilisation des chaloupes dahouétines. L'ingénieur Pelaud signalait en 1878 environ 8 barques à Dahouët, nombre que l'on retrouve encore en 1900. Après la guerre 1914-18, les chalutiers furent réduits à trois cotres à Dahouët et trois bisquines à Erquy. A côté se développait une flottille de doris, provenant de la pêche morutière, utilisés comme "bateau polyvalents, à tout faire", pour le goémon, les lignes, les filets. La pêche côtière dans la 1ère moitié du 20ème siècle En 1902, le capitaine Jean Hamonet de Dahouët évoquait, dans un rapport à la Chambre de commerce de Saint-Brieuc sur le dépeuplement de la baie, ses causes et les moyens d'y remédier. En particulier ce rapport accusait une sur-pêche des huîtres, depuis l'adoption du chalut et la disparition du naissain depuis 1860 et la raréfaction des crustacés. Dans cette même période, depuis le milieu du 19ème siècle, on pouvait constater une diminution de la ressource côtière sur l'ensemble des littoraux costarmoricains, liés à une mauvaise gestion des pêcheries et à l'apparition du chalut à perche, qui causait des dégâts dans les frayères. La saison d'été était propice à la pêche aux maquereaux et aux lignes, alors que les pêches d'hiver utilisaient le chalut. De la grande pêche à la pêche côtière contemporaine La grande pêche morutière allait offrir une alternative aux pêches côtières et aux marins du terroir, en proposant de nouveaux territoires de pêche de 1860 à 1910. Cependant, les nouvelles techniques de pêche et la généralisation du moteur associée à des gréements plus performants, bouleversèrent l'économie des pêches locales jusqu'à la crise de 1930. Cette situation ne fit qu'empirer par la suite, sauf en temps de guerre, où les bateaux de pêche faisaient des sorties moins fréquentes. Le chalutage moderne, dans la bande des trois milles contribua, malgré les limitations mises en place dans le dernier quart du 20ème siècle à cette surexploitation des fonds marins côtiers. Les dragues furent ensuite utilisées dans les années 1960 pour découvrir de nouveaux coquillages, praires et coquilles Saint-Jacques et réensemencer les fonds par les rejets de petites coquilles. Cependant, les gisements s'épuisèrent, avant que ne se mette en place une véritable politique de gestion des pêches, de cantonnements et de quotas. Il fallut attendre les années 1960-1970 pour que le port de Dahouët retrouve une flottille de pêche conséquente grâce à la coquille Saint-Jacques et aux pêches polyvalentes. Puis, dans les années 1990, la pénurie des fonds obligea les capitaines côtiers à aller pêcher plus au large, à l'initiative d'un marin dahouëtin très entreprenant Jean Porcher, qui prit l'initiative de créer un armement coopératif de plusieurs chalutiers hauturiers. Aujourd'hui, le port de Dahouët compte une dizaine de bateaux de pêche côtière. Les navires hauturiers ont choisi Erquy ou Saint-Quay-Portrieux comme port d'attache et de débarquement. Le petit port de Piégu a rarement été fréquenté par les pêcheurs côtiers, à l'exception de ceux qui venaient livrer leurs crustacés aux viviers Hernandez, Vargas puis Ouhlen dans la 1ère moitié du 20ème siècle. La construction du môle de Piégu profita davantage aux pêcheurs plaisanciers. Les maquettes des bateaux de pêche de Robert Bouguet permettent d'illustrer les différents types de bateaux de pêche du port de Dahouët, à l'époque contemporaine.

  • Auteur(s)

Bibliographie

  • DARSEL, Jean. La pêche sous l'Ancien Régime dans l'évêché de Saint-Brieuc. Saint-Brieuc : Bulletin de la Société d'Emulation des Côtes du Nord, Tome CII, 1962.

  • DANYCAN DE L'ESPINE, Eugène. Pléneuf et ses environs. Guide du Baigneur. Les bains de mer - Plage du Val-André - Bretagne (deuxième édition revue et augmentée). Paris : Imprimerie-Librairie de l'oeuvre de Saint-Paul, 1883.

  • GRIMAUD, Michel. Pléneuf-Val-André et Dahouët au temps du train Renard, des goëlettes et des processions. Saint-Brieuc : Imprimerie briochine, 1982.

  • GUIGOT, André. Dahouët, port de Bretagne. Tome 1. Saint-Brieuc : Breizh-Compo, 1988.

    p. 164-173
  • HABASQUE. Notions historiques, géographiques, statistiques et agronomiques sur le littoral du département des Côtes du Nord. Marseille : Laffitte Reprints, 1832-1836.

Annexes

  • Annexe n°1
Date(s) d'enquête : 2003; Date(s) de rédaction : 2003