Historique de la goélette "Alcide", ex-Notre-Dame-des-Dunes
Récit de Jean-Paul Turquet, d'après les recherches historiques complémentaires de J. P. Mélis.
Notre-Dame-des-Dunes était une goélette Islandaise construite aux chantiers Dunkerquois
par Auguste François Pyotte Beyaert, elle fut lancée le 24 janvier 1886, deux jours après la goélette la "Charmeuse", pour l'armement Bonvarlet. Construite sous la surveillance du Bureau Véritas qui lui octroie la cote 16,4 3/3 G 1.1. D'un tonnage de 271 Tonneaux de jauge brut et 107,30 de jauge net, ses dimensions sont de 28,30 m de long, 7,00 m de large et 3,33 m de creux .
Journal de bord commencé le 25 Février 1886. Livre de Punition paraphé le 9 Février 1886.
De 1886 à 1889 commandée par Pierre joseph Zoonekynd ou son frère Pierre Nicolas, sous les couleurs de l'armement Bonvarlet, elle effectuera quatre campagnes en Islande, armée à la grande pêche pour faire la pêche à la morue.
Elle était armée par 18 à 19 hommes pour la plupart de Dunkerque et de sa région Bray-Dunes, Zuydcoote, Ghyvelde, Fort Mardyck et parfois des belges ou des hollandais. Sur ces navires tout le monde parlait flamand.
Lors de son premier voyage Dunkerque Islande, départ le 1er mars 1886, elle casse le gui et subit une entrée d'eau importante le 5 mars qui l'oblige à faire relâche à Northshield pour réparer (rapport de mer paraphé par le consul de France à Newcastle).
L'année 1888 aura été une année terrible pour les pêcheurs en Islande, la météo est épouvantable.
Le récit du capitaine Halna commandant la goélette "Marie Valentine" est édifiant : ''Vers 02 h 30 du matin un choc terrible ébranle la goélette... La mer par torrent entre dans la coque... Par chance le navire en avarie rencontre le "Notre Dame Des Dunes" et les deux navires naviguent de conserve. Le capitaine Zoonekindt promet à son camarade de ne pas l'abandonner. Le lendemain la "Marie Valentine" paraissant faire moins d'eau, son capitaine insiste pour que Zoonekindt poursuive sa route seul. Le "Notre Dame Des Dunes" s'éloigne donc, car la pêche n'attend pas. Le soir même la situation s'aggrave à bord du "Marie Valentine", par bonheur le navire est aperçu par la goëlette "La Fiancée" qui recueille son équipage. Il était temps, car la "Marie Valentine" coule peu après à 80 miles de l'Islande ("Grande pêche" de J.P. Mélis).
Le 28 avril 1888 le capitaine Zoonekindt perd un de ses hommes dans la tempête. Dans cette terrible tempête plusieurs navires sombrent et sur le "Notre Dame Des Dunes", les vergues, cornes et bômes sont brisées, les grands voiles et les focs emportés.
En 1889 l'armement Bonvarlet stoppe sa participation à la pêche en Islande, qu'elle avait commencée en 1803 et continuée sans interruption depuis 1814 et met en vente les navires "La Foi", "La Souveraine", la "Marie louise" et la "Notre Dame Des Dunes".
De 1890 à 1896 elle sera commandée par le Capitaine Zoonekynd, mais le navire aura été vendu entre temps à l'armement Deck, Vanarien et Frère.
De 1897 à 1899 dans le même armement, elle sera commandée par le capitaine Charles Louis Dewaele.
De 1900 à 1910 Dans le même armement, elle sera commandée par Charles Louis Handtschoewercker, qui effectuera 11 campagnes avec elle .Il aura exercé son premier commandement sur l'"Isabelle" en 1891. Devenu veuf en 1899, il embarque son fils âgé de 9ans sur "La Foi" qu'il commande depuis 2 ans. Ce fils l'accompagnera Sur le "Notre-Dame-Des-Dunes" presque à chaque campagne et passera de mousse à matelot en 1906, il était alors agé de 16ans. Ce capitaine aimait certainement naviguer en famille car on comptera, à bord, jusqu'à quatre Handtschoewercker en 1908.
En 1903 le produit de la pêche est de 249 tonnes, en 1904, de 273 tonnes, en 1906, 216 tonnes, en 1907, de 402 tonnes.
Le "Notre-Dame-des-Dunes sera vendu en 1910, vraisemblablement en novembre 1910, car la première visite du navire à flot par la commission maritime date du 15 novembre et la première visite de partance du 8 décembre 1910. Je pense que son capitaine qui sera aussi son armateur sera Alcide Sauvignon, car le navire sera débaptisé, et s'appellera désormais "Alcide". "Alcide", capitaine armateur Alcide Sauvignon de 1910 à 1913.
Le navire passera au cabotage international, mais restera immatriculé à Dunkerque. Pendant ces trois années il sera sous le commandement du Capitaine Alcide (Alfred) Sauvignon, armé par six hommes.
Le premier voyage Dunkerque Setubal, au Portugal, certainement au mois de décembre 1910. Le retour s'effectuera vers Gravelines, départ le 5 janvier 1910 avec un chargement de sel. A cause du mauvais temps il fait escale à Vigo puis relâche à Camaret avant d'arriver à Gravelines le 27 janvier 1910. Ce premier voyage, comme quelques autres, avec un chargement de sel en provenance de Setubal vers Dunkerque ou Gravelines, s'effectue toujours au mois de janvier, février, au plus tard en mars, car il s'agit de desservir en sel les goélettes Islandaises dont le départ en campagne de pêche avait lieu en mars/avril. Le sel, que ces navires allait chercher à ''Setub'', comme on disait à Dunkerque, était stocké, dans des entrepôts sous douane ou à bord des transporteurs jusqu'à sa mise en tonnes par les ''Islandais''. Les armateurs et les capitaines de ces transporteurs de sel étaient très favorable au stockage sur leur navire, car ça les protégeait de la corrosion. L'"Alcide" effectuera aussi quelques voyages vers St-Pierre et Miquelon pour ramener de la morue verte.
Les ports touchés pendant ces trois années seront très divers : Cherbourg, Les Sables d'Olonne, Cadix, Boulogne sur Mer, St-Pierre et Miquelon, Setubal, Dunkerque, Gravelines, Oléron, St-Nazaire, Swansea, St-Martin de Ré, La Rochelle, Aiguillon.
Il semble, d'après les rapports de mer et les procès verbaux de visite, que pendant cette période le navire ait subi quelques avaries.
- Ainsi, le 27 février 1911 quittant Dunkerque pour Cherbourg avec 197 tonnes de briquettes, dans le mauvais temps, il talonne puis s'échoue au lieu dit Dymchurch. Il essaye de se déséchouer, avec ancre et cordes à la marée montante, puis avec l'aide d'un chalutier à vapeur. Malheureusement, la remorque casse ; finalement un deuxième remorqueur s'attelle et le déséchoue. Malgré que les hommes d'équipage pompent à tour de bras, les logements sont envahis par l'eau. Le capitaine, après avis des principaux de l'équipage, décide alors d'échouer le navire à la côte. Il fait toujours mauvais temps et le navire échoué est surveillé par le canot de sauvage de Dunkerque pendant toute une nuit. Enfin le vent mollit, l'équipage arrive à renflouer le navire par ses propres moyens et ils font route vers Dunkerque en pompant sans interruption car ils ont beaucoup de mal à tenir les pompes franches. Le navire arrive à Dunkerque le 2 mars dans la nuit, les hommes continuant à pomper jusqu'au matin où le capitaine va chercher du renfort et une autre pompe car ils sont exténués.
Les avaries subies sont importantes, le procès verbal de visite mentionne ''La goélette "Alcide", revenue à Dunkerque en avaries après échouement y a subi d'importantes réparations. Elles ont été effectuée sous la surveillance des experts du Bureau Véritas''
- Le 28 Décembre 1911 lors d'un voyage Boulogne/Mer - Les sables d'Olonne avec un chargement de 200 tonnes de ciment, essuie une tempête les 5 et 6 janvier 1912 en passant le chenal du Four et le Raz de Sein, le 7 après une accalmie, il vente à nouveau en tempête devant Belle Ile, la mer devient très grosse le pavois est défoncé ainsi que la cuisine, le petit foc et la trinquette sont déchirés. Le 8 la tempête se calme, mais du 8 au 13 c'est maintenant la brume et il rentre au port le 14 janvier avec un navire qui a beaucoup souffert.
- Le 26 février 1912 parti de Setubal avec un plein chargement de sel à destination de Gravelines par petite brise et mer belle, au passage de Finistère le 29 le vent commence à souffler en tempête, passé Ouessant le vent mollit légèrement le 3 mars, puis recommence à souffler en tempête, arrivé devant Gravelines le 5 mars, impossibilité de rentrer, réussi à relâcher à Dunkerque. Reparti de Dunkerque le 8 mars par beau temps à destination de Gravelines, à cause de la direction des vents impossibilité de rentrer, même manoeuvre le 9 le navire s'échoue à 900m du bout de la jetée. Malgré l'élonge d'une aussière frappée sur une ancre, tous les efforts sont vains. Le capitaine décide d'alléger le navire en jetant une partie du sel avec l'aide d'une équipe venue de Dunkerque. A la marée du 10 au matin essai de déséchouage, échec. Dans l'après midi Il continue à alléger ; opération réussie à la marée de l'après-midi, le navire rentre à Gravelines avec l'aide d'un remorqueur. Le navire a été allégé d'environ 50 tonnes de sel.
La visite de partance du 27 mars 1912 mentionne ''La goélette Alcide vient de subir d'importantes réparations par suite d'avaries provenant d'un échouement. Ces réparations ont été faites sous la surveillance du Bureau Veritas
- Voyage St Martin de Ré à destination de Dunkerque avec un chargement d'orge en vrac. Départ le11 août 1912, le 12 août sous Penmarch, mer très grosse, tempête de noroît le hunier se déchire, mise à la cap, le 13 même type de temps, le navire fatigue beaucoup et prend l'eau, le 14 le vent ayant "beausi" passé le Raz de Sein et le chenal du Four, rentré à Dunkerque le 17 Août 1912. Le capitaine craint des avaries dans la cargaison.
Le 6 Décembre 1912 à Dunkerque visite annuelle du navire présidé par L'Administrateur. La 1° côte du bureau Véritas est confirmée, après une 1° visite à sec au mois de mars date à laquelle la carène a été entièrement nettoyée et repeinte, la mâture, le gréement, la voilure et les parties supérieures ont été trouvés en bon état de conservation et d'entretien.
La commission déclare : '' Malgré son âge (27 ans) le navire est très propre et très bien entretenu dans toutes ses parties. En conséquence, la Commission propose le capitaine au cabotage Sauvignon Alfred inscrit à La Rochelle N° 31 pour une lettre de félicitation du Ministre...''.
Après une visite de partance le 4 décembre 1913, l'"Alcide" effectue son dernier voyage de l'ère Sauvignon : départ de Dunkerque le 7 décembre à destination de La Rochelle où il arrive, après s'être réfugié 20 heures en rade Weymouth à cause du mauvais temps, le 18 Décembre 1913.
De 1914 à 1934 capitaine armateur Pierre Marie Le Cozic.
L'"Alcide" sera vendu en janvier ou février, à La Rochelle, à mon grand père Pierre Marie Le Cozic.
La première visite annuelle de l'ère Le Cozic à lieu le 2 février 1914 le navire est immatriculé à Dunkerque et armé à La Rochelle, avec un équipage de 6 hommes.
Son premier voyage sera La Rochelle Brest du 3 au 5 février 1914 avec un chargement de chaux hydraulique. Déchargement jusqu'au 18 février, puis chargement de phosphate.
Après une visite de partance le 28 février, l'"Alcide" quitte Brest le 10mars pour Pont-Labbé, avec un chargement de 181 tonnes de phosphate. Il arrivera à destination le 15 mars 1914, après un voyage de mauvais temps et une mer grosse, le navire roulant bord sur bord embarque de l'eau qui oblige l'équipage à pomper constamment pour éviter des avaries au chargement de phosphate.
Après plusieurs voyages, retour aux Sables d'Olonne le 17 juillet1914. Le navire restera aux Sables jusqu'au 9 novembre 1914 ; on installera un canon à bord. Pendant cette période se déclare la guerre 1914-1918 le 3 août et Pierre Le Cozic est placé en catégorie A, comme les inscrits maritimes en sursis de levée à titre exceptionnel, peut-être à cause de sa fonction de capitaine armateur, nécessaire au commerce pendant la guerre.
L'"Alcide" repartira des Sables le 9 novembre 1914 pour Swansea, sur lest, elle subira pendant cette traversée une tempête mémorable, voyant le baromètre descendre à 291,5 et arrivera à Swansea le 19 novembre, avec le grand foc, le clin foc et le hunier déchirés.
Pendant la guerre des convois sont organisés et les navires sont obligés de montrer patte blanche avant de pouvoir entrer à Lorient ou Brest ; pour partir, il leur faut l'autorisation de l'Amirauté.
Exemple d'une traversée en Avril 1917 :
Parti de Swansea le 4 avril 1917, à cause de mauvais temps il rejoint Falmouth avec difficulté le 6 avril vers 18 heures ; on signale que le convoi escorté par le chalutier ''Morvina'' partait à 19 h 30. Journée du 7avril petite brise ou calme plat, il manque d'être abordé par le ''Cancalais'', le 8 avril vers 4heures du matin, de nouveau arraisonné par le travers du Conquet, il mouille par la suite en rade de Camaret. Le lundi 9 avril les bureaux étant fermés, le mardi les autorités préviennent qu'il n'y aura pas de convoi ce jour pour le Golfe. Dans la nuit se lève une tempête, filé 4 maillons sur chaque chaîne, lors d'une accalmie, le capitaine décide d'appareiller mais casse la corne de la misaine, ne pouvant pas continuer sans misaine décide de relâcher à Brest le mercredi 11avril. Le 12 avril il répare la corne et dévergue les voiles déchirées, la flèche et le hunier. En attente des ordres de départ.
Le 21 avril, ne voyant rien venir le capitaine décide d'aller à la Préfecture Maritime aux ordres. Le 22 avril, on lui signale qu'il n'y a pas de convoi et on lui conseille donc de rester près de terre. Appareillage le 22 avril, mais pendant la manoeuvre d'appareillage le navire heurte le quai et casse son Bout-dehors, ce qui l'oblige à revenir au mouillage avec l'aide d'un remorqueur. L'ancien bout dehors et les voiles sont dégréés et on fait fabriquer un nouveau gréement. Tout est terminé le jeudi 26 avril. Appareillage le 27 avec beaucoup de difficulté à cause d'une brise très fraîche qui s'est levée. La suite de la traversée s'effectuera sans autres difficulté et L'"Alcide" entrera à La Rochelle le mardi 1er mai à 10 heures du matin.
Ainsi, un voyage qui d'habitude s'effectuait en 6 ou 7 jours avait, en temps de guerre, pris 26 jours, de quoi décourager ces vaillants ''écraseurs de crabes'' comme on les appelait.
Un voyage mouvementé :
Parti de Lorient le mercredi 9 janvier pour Swansea, avec un chargement de poteaux de mine, le 10 janvier, le navire fait escale à Bénodet, repart de Bénodet le 13 par faible brise, le 14 passe à ranger l'entrée d'Audierne pour aller à Camaret chercher le convoi, à 11h 30 fait route avec celui-ci, le 15 à 10h, vient mouiller à Falmouth pour faire relâche. Il resté au mouillage jusqu'au 26 janvier prêt à appareiller ce jour à 8 heures quand un patrouilleur le ''Sapler H 580'' l'aborde par tribord avant, à la vitesse de 3/4 noeuds, sans avoir mis les machines en arrière. Les dégâts sont importants : deux bordées de préceintes, deux jambettes cassés, lisse, pavois, plat bord, coupés, membrure cassée, la braie cassée, sortie des coutures montre que la partie avant du navire a été fortement ébranlée.
Le capitaine fait immédiatement un rapport de mer affirmé auprès du consul de France. Sur la requête du consul, deux experts sont nommés par L'Amirauté, le 27Janvier. Le capitaine est convoqué à la Douane pour un questionnaire sur les conditions d'abordage. Le 1er février, aucun mouvement de la part des Anglais, le 5 février, le capitaine demande au Consul de commencer les réparations, refus de l'amirauté, enfin le 6, visite d'un ingénieur du chantier et d'un maître charpentier. Le navire resté sur rade jusqu'au 11 février, date à laquelle on déhale le navire le long du quai. Le 1er février, rien ne se passe, enfin le 13, les ouvriers commencent la démolition, le 14 poursuite des travaux de démolition, le 15 rien, le 16 visite des experts, pas de travail, les réparations seront terminées le 9 avril 1918, l'agent du Bureau Veritas confirmant la côte du navire. Sorti de Falmouth le12 avril fit route le 13 ; le 14, mer très grosse, le hauban de misaine est cassé, le navire arrive à Swansea le 15 avril 1918.
Ainsi ce voyage aura duré 3 mois, on imagine le manque à gagner du capitaine armateur. Je ne sais s'il reçut des indemnités de la part des assureurs, en temps de guerre avec l'Amirauté anglaise, cela n'a pas du être facile à gérer.
A Lorient le 12 Mars 1919, le mousse se coupe l'index de la main droite, soigné par le Docteur Pedrono qui fait des points de suture et lui permet d'aller jusqu'à Brest. Je ne sais s'il a débarqué dans ce port. Mais le temps étant très mauvais le capitaine décide de monter sur le gril le 18 mars pour calfater et passer de l'enduit, après deux jours de pluie, le temps "beausit" et permet de finir le travail, le navire sort du grill le 20 au Soir. Le lendemain on enlève le socle du canon pour calfater le pont en dessous qui laisse passer l'eau.
Depuis quelques voyages, il y a des rentrées d'eau par la coque, le capitaine profite d'une escale à Port-Louis pour faire venir des calfats pour résoudre le problème. Les travaux dureront du 3 septembre au 19 septembre 1919.
Quand le capitaine devient médecin : en escale à Lorient, Hypolite Le Coz, le bosco tombe malade en revenant de chez lui le 28 janvier 1920 : fièvre, langue chargée, le capitaine le fait coucher et lui donne des boissons chaudes et une purge. Ne voyant pas d'évolution, le Capitaine fait appel au médecin habituel qui est absent, un autre médecin est sollicité qui vient le 30 janvier et délivre une
ordonnance, le 31 le malade va mieux, la fièvre est tombée mais il tousse beaucoup, le capitaine lui fait boire du thé chaud toutes les deux heures. Le 3 février on fait revenir le médecin qui lui prescrit une nouvelle ordonnance, le 4 au matin, on purge le malade ; le 5 le médecin revient et finalement le fait hospitaliser, comme l'y oblige les lois maritimes, le capitaine fait alors l'inventaire du sac en triple exemplaire, en présence des principaux de l'équipage et le 6février dépose les affaires à l'Inscription Maritime. Le capitaine retourne le voir à l'hôpital le 7, le malade va mieux, le dimanche, il devait y retourner mais il est entraîné à la vente d'un navire à Port Louis où il achète avec Breurec, Gaouiat, Rouzès, un thonier le "Léon 13".
Francois Gaouiat, oncle de Pierre Gaouiat de Ploumanac'h camarade d'école de tonton Pierre, commandait le dundee "El Jezaîr".
Le navire part le 17 novembre1920 de Cardiff avec un chargement de charbon à destination de St Brieuc où il arrive le 24 et décide de désarmer le navire.
Le navire reste désarmé jusqu'au 29 août 1921, il se résout alors à le réarmer, car il constate que le bois souffre de la sécheresse. Un procès-verbal de visite annuelle est dressé le 6 septembre 1921 : le navire est en bon état de navigabilité et la partance est autorisée. Départ de St Brieuc le 7 Septembre à destination de Cardiff.
Lors du voyage Bayonne Douarnenez du 13 au 27 octobre 1921, avec un chargement de sel en vrac, il essuie un coup de vent terrible . Le navire fatigue beaucoup et fait de l'eau qu'il faut pomper constamment, ceci amène le capitaine à faire un rapport de mer de crainte que le sel soit en partie fondu et par conséquence des avaries dans la cargaison.
Désarmé le 10 novembre 1923, l'"Alcide" est réarmé le 27 mars 1924. Visite de partance et annuelle le 7 avril 1924, le navire est déclaré en bon état de navigabilité, en raison de sa bonne tenue ; la commission demande pour le capitaine au cabotage Le Cozic Pierre Marie les félicitations du ministre. Le certificat de 1ère cote Véritas est valable jusqu'à septembre 1924.
A Lorient le 17 avril 1925, le navire prend un chargement de poteaux de mine à destination de Cardiff, mais une grève empêche le navire de finir de charger et le 22 juillet, le capitaine demande le déchargement de la marchandise, ce qui fut fait à apparemment à ses frais du 5 août au 12 août.
L'"Alcide" part ensuite de Boulogne-sur-Mer le 25 novembre 1926 avec un complet chargement de ciment à destination de Vannes ; il essuie une tempête de Nord Ouest qui oblige l'équipage à pomper toutes les quatre heures, mais le navire fatigue beaucoup il faut pomper toutes les heures. Au large de Barfleur, il reste encalminé toute une nuit par une mer terrible, le bateau roule bord sur bord, le pont constamment couvert d'eau. Le 30 novembre, il double Ouessant à 3 heures du matin par une furie de temps. Il passe à raser Ar Men pour chercher de l'abri à terre et arrivée à Vannes le 2 décembre, où le Capitaine fait un rapport de mer car il craint des avaries à son chargement de ciment.
Après un voyage entre Morlaix et Cardiff du 26 octobre 1932 au 10 novembre 1932, le navire est désarmé du 15 novembre 1932 au 15 mars 1933.
L'année 1933 aura été marquée par le manque de fret et de très nombreux voyages sur lest à destination de Cardiff.
Le dernier voyage de L'"Alcide" s'effectuera avec un chargement de charbon, du 17 juillet 1934 au 27 juillet 1934, entre Swansea et Lannion, après être resté au mouillage de l'île Millau à Trebeurden du 21 au 25 Juillet 1934.
Après 48 ans de vie active voici ce que l'Inspecteur de Navigation inscrivait dans son procès verbal du 27 juin 1934 :
'' Aujourd'hui 27 juin 1934, la Goélette "Alcide" a été visitée sur le gril de Morlaix. L'étoupe a été décrochée en plusieurs endroits et trouvée en bon état. Les coutures indiquées seront rebattues ainsi que les abouts. La coque dans son ensemble est parfaitement saine, sans aucune trace de "pictures". Le fond du calfatage est très bon. On devra à la première occasion favorable changer la fausse quille ou plutôt lui en mettre une''. Il ajoutera pour la partance ''Navire en parfait état et possédant tout le matériel nécessaire pour assurer une bonne navigation.''
Je crois que l'on peut rendre hommage aux chantiers Pyotte Beyaert de Dunkerque qui construisaient ces solides Goélettes destinées aux rudes assauts des mers Islandaises, ainsi qu'aux armateurs successifs qui ont su entretenir parfaitement l'"Alcide", qui s'est arrêtée faute de fret et s'avérait dépassée par l'essor de la vapeur.
Le navire sera désarmé définitivement à Lannion le 29 Août 1934 faute de fret.
Quelque temps plus tard le Capitaine Le Cozic choisira la marée la plus importante de l'année pour échouer son navire à la limite des champs dans l'anse de Toëno en Trebeurden où il finira sa carrière. Aujourd'hui la quille et l'étambot sont encore visible dans le sable.
De 1914 à 1934 l'"Alcide" aura effectué 221 voyages principalement en direction de Cardiff et de Swansea.
Pendant toutes ces années Pierre Le Cozic naviguera avec cinq hommes d'équipage, ainsi qu'en témoigne le livret des gages de l'équipage. Il y a d'ailleurs une remarquable stabilité de ces hommes, ce qui signifie une grande confiance dans l'habileté et l'honnêteté du Capitaine. En effet, ces voiliers circulaient toujours dans des conditions difficiles (vent, courant), tempête en hiver et traversaient en permanence des parages très fréquentés. La manoeuvre de ces voiliers n'avait rien de comparable avec celle d'un vapeur, surtout avec six hommes d'équipage et mon grand père s'honorait de n'avoir jamais perdu un homme.
Entre 1915 et 1920 la solde de l'équipage à énormément augmentée : ainsi en 1915 le bosco touchait 90 F par mois, moins 10F 35 d'invalides et le même touchait 450 F moins 25F 87 d'invalides en 1920.
Le principal affréteur aussi bien en France qu'en Angleterre était la société Marceshe et Cie, négociants en charbon anglais et poteaux de mines, qui ont constitué l'essentiel du fret transporté par l'"Alcide" au long de ces années.
Les chartes-parties étaient rédigées à Vannes par la société Marius, agent maritime, à Lorient par L. De Fallois, courtier maritime à Cardiff. Il s'agissait de Cory and Blundell ou Baker and Kernick, Lt à Swansea.
Les réparations et carénages à Auray étaient effectués par J. Guillouzic, constructeur quai de St Goustan. Les cordages venaient de la Corderie de Conleau A. Chaucheprat Fils à Vannes. Quant à la voilerie, le principal fournisseur était la maison Bessonneau d'Angers.
A Cardiff, l'avitailleur préféré du Capitaine était R. Cory ans Sons.