La chapelle Notre-Dame du Crann dépend de la paroisse de Spézet, qui sous l'Ancien Régime, appartient au chapitre de Quimper depuis sa donation par l'évêque en 1218.
Construite vers 1535, sur les terres des Vieux-Châtel, elle succède sans doute à un premier édifice bâti au XIIIe siècle. Elle porte l'inscription suivante sur le contrefort droit du bras nord du transept, qui nous renseigne sur le contexte de son édification : « … CHAPPELE FUT FOUNDEE L MVCXXXV A LONEUR DE NOTRE DAME DU CRAN METRE H BONET VICERE ET I LESCOAT P. FABRICIENS ». Ainsi sont mis en avant deux membres de la fabrique, le vicaire perpétuel, c'est-à-dire le prêtre en charge de la cure, nommé par le chapitre de Quimper et le procureur de la fabrique. Plus tard, dans le courant du 16e siècle, la fabrique laisse d'autres preuves de sa contribution financière, à travers des inscriptions sur deux des 8 verrières conservées dans la chapelle, accompagnées des dates 1548 et 1553.
Bénéficiant d'un contexte très favorable, résultant de la conjonction de plusieurs facteurs au milieu du 16e siècle, la chapelle et son décor mobilier (maître-autel et son retable, verrières etc.) sont globalement homogènes. Seuls sont ajoutés au 17e siècle siècle la sacristie (inscription : "Y GUEN COAT FRAVAL FA 1653") et le clocher, à une date inconnue.
La richesse de la fabrique découle de l'important pèlerinage qui a cours à Notre-Dame du Crann, en lien avec le trésor de reliques qui y est attesté à partir du 16e siècle. Ce dernier comprend des reliques du lait séché et des cheveux de la Vierge Marie, de la tête et du tibia de saint Julien, du Saint-Sépulcre, du sépulcre de Lazare, de la Sainte Croix, de saint Pierre, sainte Thècle, saint André, saint Cyprien et saint Laurent.
Le rôle de la noblesse dans la construction et l'embellissement de la chapelle est plus difficile à cerner car les blasons visibles sont tous muets, excepté celui du chevet, qui est postérieur au chantier. Mais l'on peut imaginer que les seigneurs fonciers, en particulier ceux du Crann, les Vieux-Châtel, en faisant d'un des deux bras du transept leur chapelle personnelle, contribuent d'une manière ou d'une autre à l'édification de l'ensemble.
Il faut enfin souligner les liens étroits entre la paroisse et le chapitre de Quimper auquel elle appartient, qui permettent sans doute d'expliquer la très grande qualité de certaines des verrières de cet ensemble. Les commanditaires ont dû être mis en contact avec des artistes quimpérois de renom, peut-être via le chapitre et avoir accès à des propositions technique et iconographique particulièrement élaborées.
[Garance Girard, enquête thématique régionale, 2023]
Chargée d'études à l'Inventaire