Historique rédigé à partir des recherches menées par Marcel Hodebert
Lors de la réalisation du premier cadastre de la commune en 1820, la configuration du lieu était assez différente. Ainsi, les bâtiments formaient-ils une cour fermée. Il existait à l'époque une aile en retour d'équerre au sud-est du logis actuel et il semble qu'il existait une tour, sur cour, à l'intersection des deux corps de bâtiment. De même que le bâtiment qui se trouvait sur le flanc ouest de la cour, aujourd'hui, cette partie des bâtiments a disparu. La partie est, qui abrite actuellement un garage, est probablement un vestige de ce bâtiment.
Les éléments architecturaux les plus anciens de ce manoir remontent à la fin du 16e siècle (porte de la façade sud, porte à coussinet intérieure, cheminée et fenêtres à coussièges de l'étage).
La seigneurie de la Rivière appartenait aux Guihard en 1541, puis, en 1580, à l'écuyer René Jumelais et Françoise de Couasnon, sa femme. Cette même année, ils vendirent la Rivière à Jean Guérin de la Grasserie pour 4.020 écus. La seigneurie était entre les mains des Baston de Bonnefontaine en 1627. La Rivière entra en possession des Baston, seigneurs de Bonnefontaine, sans doute par héritage des Guérin de la Grasserie, ces deux seigneuries étant sur le territoire de Louvigné du Désert.
En 1712, le tuteur des enfants d’Ambroise Baston avait mis judiciairement en adjudication pour un bail à ferme les deux tenues de la Rivière et de la Caillebotière et l’adjudicataire fut un certain Jean Guérin, sieur de la Haye, que l’on dit « marchand ». Ce «fermier» n’exploitait pas personnellement les terres, mais devait les louer à des laboureurs.
En 1716, un mémoire fait état de réparations aux couvertures des bâtiments de la Rivière.
En 1717, un procès-verbal de la mise en adjudication des héritages d’Ambroise Baston pour ses enfants mineurs est rédigé par François Bachelot, procureur de François Pelet de la Hussonnais. Ce document décrit les biens mis en adjudication. Pour la tenue de la Rivière, cela concerne : « un grand corps de logis contenant plusieurs appartements tant pour la retenue que pour loger les fermiers et faire valoir ledit lieu ; le jardin au devant ; une petite maison en terrassé non doublée, proche le grand chemin ; le champ devant ; autrement le champ de la Hutte avec la châtaigneraie et un petit jardin au proche, contenant ensemble deux journaux environ ; le petit champ derrière contenant un journal ou viron ; le champ de la Chapelle contenant trois journaux ; le Petit Vault-Hodial, deux journaux : le Grand Vault-Hodial, trois journaux ; la Maraubrée, trois journaux ; le Pré d’Enfer, un journal et demy ; le pré dessus le grand chemin, six journaux ; trois petites landes, trois journaux le tout ou viron».
Un bail de 1742 passé entre la famille Baston et le sieur Lepaigneul et sa femme, dit que les preneurs de l’exploitation de la Rivière sont « tenus d’acquitter la fondation de la chapelle de Saint Julien de la Rivière qui est de 45 livres par an, de fournir le chapelain, les ornements, le vin et les cierges aux messes qui doivent être célébrées toutes les semaines de l’année, d’entretenir ladite chapelle de grosses et menues réparations, de couverture d’ardoises, portes et vitraux, même la charpente en cas qu’elle fut rénovée ou les dommages par l’impétuosité des vents auxquels elle est exposée par sa situation dans une pièce de terre fort élevée ».
Ce même bail dit également que les preneurs « doivent aussi payer les rentes seigneuriales et féodales dues sur ledit lieu de la Rivière et entretenir les maisons et logements dudit lieu, réparations, et de fournir toutes les matières nécessaires comme ardoises, essentes, carreau, clous, lattes et chevilles, de manière qu’ils le sont entretenus en bon et dû état des réparations ; de plus, de faire faire à leurs frais les barrières ou claies nécessaires pour les clôtures des pièces de terre et de fournir en bois convenable, sans en pouvoir prendre sur le lieu où il s’en trouve en très petite quantité, à peine de dommage. Ensuite, fournir au mois de février de chaque an, le nombre de trente pommiers, bons et compétents, et de les planter et mettre en place aussi à leurs frais ; et de les abryer (abriter) en paillis et buissons pour les défendre des bestiaux et de faire assidument les fossés nécessaires sur les grands chemins et autres de traverses ; et enfin de favoriser de bestiaux comme bon leur semblera à l’effet de quoi lesdits Lepaigneul et femme ont remis à Monsieur l’alloué et à la demoiselle de La Motte, sa somme de deux cents livres d’avoirement (d’avance) qui les avaient reçues lors d’un bail du 7 décembre 1742 ; ont de plus payé la somme de 200 livres pour la valeur du marnix, engrais, foin et le terrain dont ils sont chargés et qu’ils ne seront point tenus de les rendre à leur sortie et pourront en disposer comme bon leur semblera ; lesquelles charges et conditions lesdits Lepaigneul et femme ont aussi accepté pour en décharger Monsieur l’alloué et ladite demoiselle de La Motte qui par leur état et occupations particulières ne peuvent point donner leur temps, ni soin pour le conservation, entretien et amélioration dudit lieu de la Rivière… le prix du présent bail a été accordé entre parties pour et moyennant la somme de cent livres par an, nette et quitte de toutes charges, payable à la main de M. l’alloué et de ladite demoiselle de la Motte par les demi-années de Noël et Saint-Jean-Baptiste, comme elles échoiront… ».
La Rivière aurait été rattachée à la Baronnie de Vitré au 18e siècle et en serait devenue un fief.
Dans ce manoir, naquit le 1er mars 1827, Pierre Turgis qui devint à Rome le serviteur du pape Pie IX de 1867 à sa mort en 1878. Il relata les grands moments du pontificat dans une correspondance avec sa famille. Il offrit le paratonnerre et le tableau de sainte Thérèse d’Avilla que lui avait offert le pape à l'église de Javené. Son corps fut ramené à Javené après sa mort à Dax en 1879 ; sa pierre tombale a été replacée au chevet de l’église.
La chapelle Saint-Julien qui dépendait du manoir à été détruite à la Révolution. Seule, semble-t-il, une petite croix qui, autrefois, surmontait un des pignons de la chapelle, a été conservée et replacée dans la maçonnerie de la grange située à l'est du logis, construite en 1877 par la famille Turgis. En 1665, la chapelle Saint-Julien est signalée comme chapelle frairienne (chapelle située dans un écart, subdivision de la paroisse, « gérée » par les habitants du voisinage). En 1781, elle était desservie par un chapelain et fondée de 20 livres de rentes avec une messe par semaine.
Photographe à l'Inventaire