I - Caractères historiques
La vocation de la commune est essentiellement agricole : on y cultivait, outre les plantes fourragères, les céréales. Des vergers s´étendaient en grand nombre pour la production du cidre. L´artisanat n´était pas absent de l´activité humaine, notamment celui du textile, comme en témoignent les nombreuses parcelles dénommées 'chènevières' (culture du chanvre), dans l´état de section de l´ancien cadastre. Bien qu´aucun témoin matériel n´ait été retrouvé, l´artisanat du chanvre avait sa place dans la vie locale, probablement sous la forme d´une industrie domestique, afin de fournir l´activité maritime, toute proche. Le musée de la vie paysanne, non loin de là, à Baguer-Morvan, conserve des instruments de tisserands provenant de la commune de Baguer-Pican (témoignage oral).
Les dates portées sur les édifices sont très nombreuses : 17, qui comprennent des édifices qui n´ont pu être repérés. Ces dates s´étalent entre 1566 (La Hairière, non repéré). Elles se répartissent comme suit :
-XVIe siècle : 1 (1566)
-XVIIe siècle : 4 (1638 ; 1661 ; 1673 ; 1674)
-XVIIIe siècle : 8 (1706 ; 1709 ou 1713 ; 1728 ; 1740 ; 1742 ; 1756 ; 1766 ; 1768)
-XIXe siècle : 4 (1811 ; 1866 ; 188 (6, ?)
Ces chiffres permettent de faire ressortir l´accroissement probable de la construction de fermes ente 1650 et 1800. Ces chiffres sont corroborés par la datation d´autres fermes de la même époque, par architecture comparée (Vaujour, Le Ruel, Le Châtel, La Mare Pinard, Le Pont Galou). D´autre part, on remarque que les maisons sont plus nombreuses à être construites dans la deuxième moitié du XIXe siècle.
II - Caractères architecturaux
1- Situation
L´habitat dispersé domine. Les écarts sont constitués de fermes et de leur dépendances, autour de cours ouvertes ou de fermes plus modestes, disposées en longères. L´implantation humaine s´est concentrée le long des limites communales, notamment au nord, à proximité du polder, qui présente une densité de construction importante. Sur le reste de la commune, la densité est moindre, mais l´habitat isolé reste rare (Vaujour). Des zones entières sont réservées en culture (à l´ouest de la Mancelière, au sud de la Haute Roche). L´implantation des écarts par rapport aux routes actuelles est en léger retrait.
2- Composition d'ensemble
Le choix de la dénomination 'maison' ou 'ferme' n´a pas toujours été facile, certains édifices pouvant présenter des caractères architecturaux de maisons, tout en disposant de dépendances agricoles : finalement, 13 maisons ont été identifiées comme telles.
Massivement rural, l´habitat peut néanmoins être divisé en deux types principaux :
- un habitat à forte vocation agricole, souvent disposé en longères (Trohel, fig. 1 ; le Ruel), en contrebas des routes et desservies par un chemin.
- des bâtiments disposés autour d´une cour semi-ouverte, qu´il s´agisse de fermes ou de maisons (le Rocher, la Mare Pinard).
- un habitat à vocation agricole moins marqué, composé de grosses maisons (Pont Galou, fig. 2), qui se multiplient au XIXe siècle (le Champ Briand, fig. 3 ; Vienne, fig. 4).
Parties constituantes
-Le cellier est toujours mitoyen du logis. Sa présence est constante sur l´ensemble des édifices repérés. Possédant sa propre porte, il est souvent doté d´une fenêtre. L´alignement de la façade salle/cellier est, le plus souvent d´une grande cohérence.
-Les puits sont nombreux sur le territoire de la commune, allant de pair avec une habitation. Six ont été repérés, parmi les édifices pris en compte. D´autre part, le bourg en possède un certain nombre qui figurent, en partie, sur le cadastre ancien. Il s´agit de puits de granite à plan circulaire, en guérite, étêtés, selon la typologie locale habituelle (Péan, fig. 5 ; le Rocher, la Mare Pinard).
-Les soues à cochons identifiées sont au nombre de deux. Il s´agit de petites constructions en moellons de granite couvertes par un toit en appentis, généralement situées en vis-à-vis du logis. Deux portes basses constituent les seules ouvertures (Péan).
-Les étables : deux étables ont pu être repérées comme telles, au Ruel (XVIIe siècle, remaniée au XIXe) et au Domaine (XIXe siècle). Dans le premier cas, l´étable est une dépendance située non loin de la maison ; dans le second, elle est attenante au logis et surmontée d´une grange.
-Les granges : leur nombre est assez faible : on en trouve une au Domaine. A la Vallée, non repérée, parce qu´en trop mauvais état, se dresse une grange massive en granite, à contreforts. Curieusement ce bâtiment ne figure pas sur l´ancien cadastre.
-Les pressoir à pommes : dans un certain nombre de cas, les anciens pressoirs à pommes ont été transformés en éléments décoratifs. Bien que n´étant plus en place, ils sont néanmoins la trace d´une activité agricole ayant existé. Ce sont de grandes auges circulaires en granite, dont la meule a souvent disparue (le Châtel).
-Quelques pigeonniers sommaires ont été remarqués, constitués de quelques trous de boulins percés dans la façade (Vaujour, fig. 11 ; la Corbinais).
3- Matériaux
A- Gros oeuvre
Le matériau utilisé pour la construction est, selon toute évidence, tiré du sous-sol immédiat, granitique. La plupart des bâtiments est construit en appareil mixte, mêlant le granite en moellons et le schiste (la Corbinais, le Ruel). Certaines fermes sont, néanmoins construites avec un matériau homogène, qu´il s´agisse du granite (la Mare Pinard ; le Châtel) ou du schiste (la Raterie). Le cellier est toujours construit avec le même matériau que le logis, et selon la même mise en oeuvre.
B- Matériaux des baies
Portes et fenêtres, lorsqu´elles sont anciennes présentent toujours une mise en oeuvre soignée (la Haute Roche n° 3, fig. 6), en assises de granite superposées, ou en linteaux. Dans le cas d´habitat plus modeste, et au XIXe siècle, le bois fait son apparition, notamment au niveau des linteaux de portes et de fenêtres (la Haute Roche n° 2, fig. 7).
C- Le sol des habitations, bien souvent modifié par la mise en place d´une dalle de béton, est en terre battue.
D-Le matériau de couverture le plus fréquemment retrouvé est l´ardoise. Le chaume devait, cependant occuper une place importante (la Haute-Roche, fig. 14, état 1971). Un seul exemple de toiture en chaume est encore visible et bien entretenu (Trohel, fig. 8). Un autre, à la Diolais, est à l´état d´abandon. Enfin, le seul exemple de couverture en tuiles mécaniques est celui de la maison de garde-barrière, à Villouet, datant de la fin des années 1870 (fig. 9).
4- Structure
Parti de plan
Les plans rencontrés sont relativement simples et disposés dans la longueur :
-1 pièce habitable par niveau
On a affaire, dans un premier cas à des habitations à pièce unique, avec cheminée sur le mur pignon (la Planche, fig. 10 ; Vaujour, fig. 11).
Dans un second cas, la salle est flanquée d´un cellier. Chaque pièce possède sa porte et sa fenêtre, comme de coutume dans les fermes bretonnes (le Châtel, fig. 12 ; la Haute Roche n°2, fig. 7 ; Péan).
Dans le cas d´un étage, les fonctions sont croisées : salle/cellier au rez-de-chaussée, grenier/chambre à l´étage (Pont Galou ; Péan)
- 2 pièces habitables, au moins sur un niveau :
On peut trouver deux pièces à feu au rez-de-chaussée, et une à l´étage (le Champ Briand).
Ce plan peut être augmenté d´une deuxième pièce habitable à l´étage (le Rocher).
Parti de coupe
Deux partis de coupes sont observables :
-un rez-de-chaussée, surmonté d´un comble à surcroît : ce parti se rencontre fréquemment dans les fermes que l´on a pu dater du XVIIe siècle (le Châtel n°2, fig. 13 ; la Haute Roche n°3, fig. 6), mais aussi dans celles du XIXe siècle (la Raterie).
-un rez-de-chaussée surmonté d´un étage carré et d´un comble simple : ce parti apparaît dès le XVIIe siècle et perdure jusqu´au XIXe siècle (le Ruel, Pont Galou, fig. 2, le Domaine).
5- Élévations
Composition : trois types de composition de façades sont remarquables :
-pièce unique, avec comble à surcroît : les ouvertures comportent une porte, une petite fenêtre et une gerbière, formant travée avec la porte (la Planche, fig. 10 ; Vaujour, fig. 11).
-logis avec cellier, et comble à surcroît : cette composition présente deux portes en façade (ces portes offrent fréquemment le couple linteau droit/linteau plein cintre), flanquée, chacune d´une fenêtre, l´ensemble étant surmonté d´une gerbière, qui, le cas échéant peut se trouver dans l´axe de la porte (le Châtel n°1, fig. 12 ; la Haute Roche n°2, fig. 7). Cette composition peut conduire à une apparence de logis jumelés en façade, qui est en fait l´expression rationalisée du couple salle/cellier (la Haute Roche n°1, fig. 14 ; la Raterie).
-rez-de-chaussée, étage et comble. Dans ce cas, la porte est en position centrale, flanquée d´un fenêtre et d´un jour. A l´étage, on trouve les fenêtres des chambres et du grenier (Péan. ; Pont Galou, fig. 2). La façade peut être ordonnancée (bourg, 1, chemin du Dr Gringoire, fig. 15 ; Le Champ Briand, fig. 3) et de type ternaire (Vienne, fig. 4). Ce type d´élévation apparaît, sur la commune, au XVIIe siècle (Pont Galou), et se développe aux XVIIIe et XIXe siècles.
Les ouvertures
Nombreuses sont les portes de logis à linteaux cintrés, datables du XVIIe siècle. Ce linteau, clavé, peut être mis en oeuvre à l´aide d´un double rouleau d´archivolte (le Rocher ; le Châtel n°1, fig. 12 ; la Mare Pinard), ou avec un arc simple (Pont Galou, fig. 2). Des exemples de porte avec un arc en anse de panier sont visibles au Châtel n°1 (fig. 12) et à la Haute-Roche n° 3 (fig. 6).
Dans les autres cas, le linteau est droit, parfois sculpté d´une inscription concernant le propriétaire (la Haute Roche n°1, fig. 14). Les piédroits des portes peuvent être chanfreinés (Pont Galou, fig. 2) et les bases moulurées (le Châtel).
Les fenêtres sont à linteaux droits et comportent parfois des grilles (le Châtel n°1, fig. 12 ; le Rocher). Plus rarement, elles sont moulurées en accolade (bourg, chemin du Docteur Gringoire, fig. 15), alors que cette pratique est fréquente sur les anciens manoirs de la commune.
Les gerbières sont situées au sommet du mur gouttereau, le long des sablières (Vaujour, fig. 11 ; la Haute Roche n°2, fig. 7). Mais cette disposition ancienne a souvent été remaniée.
Un certain nombre de maisons possèdent des lucarnes passantes anciennes (le Ruel), que l´on peut dater de la fin du XVIIIe siècle. Leur structure est en bois, le linteau est formé d´un arc segmentaire, surmonté d´un fronton triangulaire.
Le décor
Il est quasi inexistant sur ce type d´édifice. Il n´apparaît que sous sa forme sculptée au niveau des cheminées ou des portes (un ostensoir et un calvaire sont gravés sur les piédroits de la porte d´une maison, à la Petite Rivière (fig. 16). Le décor rapporté est rare également : on ne trouve qu´une niche à Vierge, au Champ Briand, daté de 1866 (fig. 3).
6- Couvertues
La totalité des maisons et des fermes possède un toit à longs pans. Les pignons sont tous couverts, exception faite du Domaine, où ils sont découverts. Cette disposition tranche par rapport aux pignons découverts, fréquents en Bretagne. Une seule croupe est visible, dans la toiture de l´actuel presbytère, dans le bourg.
Les charpentes sont parfois anciennes, présentant toutes les mêmes caractéristiques : poinçon court, entrait retroussé et contreventement en croix de Saint-André (le Rocher, le Châtel, fig. 17 ; la Mare Pinard, Péan). Seule une des fermes du Châtel présente une charpente avec des fermes à poinçons longs.
7- Distribution
Comme d´habitude dans les fermes bretonnes, l´accès à la salle se fait directement par la porte extérieure, distincte de celle du cellier. Le seul exemple de vestibule se situe au Champ Briand. Dans les cas où la maison possède plus d´une pièce habitable, il existe des portes de communication dont la mise en oeuvre est soignée. Ces portes peuvent être cintrées et chanfreinées (le Rocher, la Mare Pinard).
Dans les cas où la maison possède un étage, l´accès à celui-ci se fait par un escalier en vis, hors oeuvre, sur le façade arrière (le Rocher), ou dans oeuvre, dans un angle (Péan). Cet escalier peut aussi être en bois (la Hairière). Les escaliers droits n´ont été repérés qu´au Champ Briand. Ils sont en bois. Dans le premier cas, il conduit à l´étage où la distribution se fait ensuite en enfilade.
Dans les cas les plus simples, l´accès au grenier se fait par une échelle.
8- Aménagements intérieurs
La pièce commune
C´est souvent l´unique pièce de la maison, en tous cas, la seule à posséder une cheminée. Eclairée par une fenêtre s'ouvrant sur la façade, on y pénètre directement par la porte d´entrée. Quelques armoires murales à côté des cheminées ont pu être observées (le Rocher, Péan), voire un évier ancien (Péan).
Les cheminées
De nombreuses cheminées anciennes, en granite, sont encore en place. Elles sont légèrement engagéess dans le mur pignon. Très hautes pour celles des XVIe et XVIIe siècles (la Mare Pinard, fig. 18 ; Péan, le Rocher, le Châtel), leur hauteur s´amenuise avec le XVIIIe siècle, époque où elles reçoivent un coffrage de bois mouluré (le Champ Briand). Les plus anciennes témoignent du soin apporté à leur mise en oeuvre : consoles, linteaux et piédroits sont chanfreinés, voire moulurés en quart de rond (Péan, le Rocher). Un décor de têtes d´homme et de femme est placé au niveau des chapiteaux des piédroits (le Rocher). A titre comparatif, on notera que la même formule se retrouve dans des salles de manoir de la commune, ainsi à Lairgué. Une niche à sel est fréquemment placée dans le contre-coeur.
9- TYPOLOGIE
Si tant est que l´on puisse établir une typologie significative sur un nombre d´édifices repérés aussi faible, elle serait la suivante :
Type I : fermes à pièce unique, sans cellier, comprenant en façade : une porte, une fenêtre, une gerbière (la Planche, Vaujour).
Type II : fermes à salle et cellier au rez-de-chaussée avec grenier dans le comble. Ce type peut prendre l´allure de maisons jumelées en apparence (la Raterie, la Haute Roche).
Type III : Maisons et fermes à salle et cellier au rez-de-chaussée, comportant un étage (le Rocher, Péan, Pont Galou).
Type IV : Maisons et fermes présentant un étage et une façade ordonnancée (le Champ Briand).