Dossier d’œuvre architecture IA29001318 | Réalisé par
Lécuillier Guillaume
Lécuillier Guillaume

Chargé d'études d'Inventaire du patrimoine à la Région Bretagne.

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  • enquête thématique régionale, Inventaire des fortifications littorales de Bretagne
  • enquête thématique régionale, Inventaire des héritages militaires en Bretagne
Batterie d'artillerie Camaret (C 342), Pointe du Grand Gouin (Camaret-sur-Mer)
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Bretagne - Crozon
  • Commune Camaret-sur-Mer
  • Lieu-dit Pointe du Gouin
  • Cadastre AB 7  ; AB 109
  • Dénominations
    ensemble fortifié, batterie, blockhaus, casemate, magasin de munitions
  • Destinations
    sentier

Le site de la pointe du Grand Gouin à Camaret constitue un exemple de réutilisation d’une même position stratégique sur le temps long, de la fin du 17e siècle à la Seconde Guerre mondiale avec la batterie Camaret numérotée "Cr 342" (4 x 22 cm), en passant par le 19e siècle avec la construction d’une batterie d'artillerie de côte avec réduit et de deux autres batteries d'artillerie (4 x 95 mm). Sur le plateau, la majorité des bunkers sont envahis par la végétation.

Cette pointe, constellée de cratères, témoigne également de la violence des bombardements durant la Bataille de Brest.

Le site de la pointe du Grand Gouin est traversé par le sentier de grande randonnée n° 34. Orientée vers l’anse de Camaret, la batterie du Petit Gouin est intégrée à la "Route des Fortifications" : batteries d'artillerie de côte, guérite, corps de garde crénelé et bunkers sont en accès libre.

Ce dossier d'Inventaire a été mis à jour en novembre 2023 avec la collaboration de Nicolas Lanvoc.

Une succession de cinq batteries d’artillerie de côte et un réduit

Situé au sommet d’une falaise faisant promontoire face au vestibule du goulet de Brest, à une cinquantaine de mètres au-dessus du niveau de la mer, le site de la pointe du Grand Gouin voit l’implantation d’une batterie de côte dès 1693. L’intérêt stratégique de cette pointe est de dominer le vestibule du goulet, mais aussi l’anse de Camaret.

Deux batteries d’artillerie de côte désignées "batterie du Petit Gouin" et "batterie du Grand Gouin" sont mentionnées sur l'Atlas des places fortes de France de 1784, elles s'intercalaient entre la Tour et batterie de Camaret et la batterie du Toulinguet. D'après l'état de 1820 et le plan de détail de 1818, le Grand Gouin comprend "une batterie de deux mortiers de 12 pouces", "une batterie de trois canons de 24 livres de balle", un "corps de garde" et un "four à rougir les boulets" ; le Petit Gouin comprend un "corps de garde" et une "poudrière" (magasin à poudre). La guérite située sur la batterie basse a été élevée en 1793 selon les recherches menées par l'Association "1846".

Le cadastre parcellaire de 1831 figure au moins six éléments défensifs (lavés en bleu car appartenant à l’État) dont quatre batteries d’artillerie de côte. Trois batteries sont orientées vers le nord-ouest, c’est-à-dire vers le vestibule du goulet et une quatrième batterie, vers l’anse de Camaret à l’ouest.

En 1841, la commission des côtes recommande l'armement de la batterie du Petit Gouin par six canons de 30 livres et obusiers de 22 cm en fer tandis qu'elle propose la suppression de la batterie du Grand Gouin. L'avis du comité des fortifications du 7 novembre 1844 confirme la décision de la commission.

La batterie du Petit Gouin est mentionnée dans l'Atlas de 1858 de mise en état de défense des côtes de l'Empire Français. Classée en 1er degré d'importance, elle est armée de trois canons de 30 livres et trois obusiers de 22 cm. Un corps de garde crénelé (n° 2 modifié pour 30 hommes) est construit en 1859 pour servir de réduit à la batterie de côte. Il appartient à un programme de constructions normalisées - les réduits type 1846 - dont les caractéristiques sont définies par une circulaire du ministère de la Guerre de juillet 1846.

Le réduit de batterie de côte est déclassé en 1889.

Une batterie basse pour quatre canons de 95 mm avec magasin à poudre sous roc est construite en 1896.

L’état des batteries de côte de 1913 mentionne au Petit Gouin une batterie haute composée de quatre canons de 95 mm avec niche et magasin bétonné, implantée sur le plateau (sur un méplat dominant le réduit) et orientée vers l’anse de Camaret. Les deux batteries d’artillerie basses sont désarmées.

Un projecteur et un poste d’écoute pour la défense antiaérienne

Vers 1937, un poste de surveillance du ciel au service de la Défense aérienne du territoire est implanté sur la pointe du Grand Gouin. La position comprend un projecteur de 150 cm de diamètre et un poste d’écoute doté d'un casernement avec magasin technique pour le groupe électrogène fournissant l’électricité, une citerne à eau et un abri à carburant. Ces installations, en lien avec la défense contre aéronef de la ville-arsenal de Brest sont sabotées en 1940 par les français avant l'arrivée des troupes allemandes (informations d'après les travaux de recherche de Julien Hily, membre de l’Association "1846").

Une batterie d'artillerie de l’Allemagne nazie (4 x 22 cm)

Une nouvelle batterie baptisée "Camaret", composée de quatre canons de 22 cm Schneider modèle 1917 long est construite par l’Allemagne nazie en 1942. Elle dépend des groupes d´artillerie côtière de l´armée de terre (Heeres-Küsten-Artillerie) 1274. Ces pièces d’artillerie démesurées (le tube mesure 7,67 m pour un poids dépassant les 25 t.), ont une portée de plus de 22 km. La batterie est desservie par une voie ferrée. Deux canons de 7,5 cm Schneider sous bunker - casemate de type 671 sont implantés en direction de l’anse de Camaret. L'ensemble de la position est défendue par des canons antiaériens.

Le site de la pointe du Grand Gouin est violement bombardé lors de la Bataille de Brest, pendant l'été 1944. Un des quatre tubes de canon de 22 cm a été projeté en bas de la falaise (il a fait l'objet d'une déclaration par Nicolas Lanvoc à la mairie de Camaret).

L’observatoire du poste de direction de tir de type 636a a été partiellement détruit Après-guerre lors des opérations de déminage.

Le site de la pointe du Grand Gouin est un vaste ensemble fortifié comprenant plus d’une cinquantaine de construction en béton armé concourant au fonctionnement et à la défense de la batterie "Camaret" composée de quatre canons de 22 cm Schneider. Les bunkers sont enterrés dans le sol et pour la plupart envahis par la végétation. Ils sont reliés par des tranchées de communication.

Chaque canon de 22 cm est implanté dans une grande cuve circulaire (11,75 m de diamètre intérieur), comprenant une rampe d’accès, deux magasins de munitions (l’un pour les gargousses, le second pour les obus), deux bunkers - abris pour les soldats et des latrines.

Quatorze bunkers permanents (Ständig Ausbau, abrégé en St), c’est-à-dire dotés de murs périphériques et de dalles de couverture de 2 mètres d’épaisseur (Baustärke B) sont recensés sur le site : un poste de direction de tir de type 636a (12 soldats), quatre bunkers - abris de type 501 (4 x 10 soldats), quatre bunkers - abris de type 502 (4 x 20 soldats), un bunker - abri de type 621 (10 soldats), un bunker - abri sanitaire de type 638 (6 soldats) et un bunker - magasin de munitions de type 641 (les portes blindées ne semblent pas avoir été posées). S’ajoutent les deux bunkers - casemates de type 671 de la batterie du Petit Gouin.

Aux constructions permanentes, il faut également ajouter les constructions de campagne, en béton, renforcées (Verstärkt feldmässiger Ausbau, abrégé en VF) ou non : un bunker - abri double type tôle métro, des bassins à eau, une cuisine et cantine, un puits à câbles (pour les communications), des magasins de munitions, un emplacement pour projecteur (60 cm) avec abri pour le groupe électrogène, des cuves pour canon antiaérien (5 x 2 cm, dont les cuves sont reconnaissables à leur piédestal de forme triangulaire et 8 x 7,5 cm Schneider) et des emplacements de mitrailleuse pour la défense rapprochée de la batterie.

Les nombreux cratères qui parsèment le site témoignent de la violence des bombardements aériens. L’une des quatre cuves pour canon de 22 cm a été détruite par les bombardements aériens.

Désignée comme la batterie du Petit Gouin, la partie basse de la pointe du Grand Gouin, orientée vers l’anse de Camaret, se compose d’un corps de garde crénelé (n° 2 modifié pour 30 hommes), de deux batteries d'artillerie françaises (remaniées) avec magasin à poudre sous roc, et de deux bunkers - casemate de type 671 (déjà mentionnés plus haut), armés chacun par un canon de 7,5 cm Schneider.

Le site de la pointe du Grand Gouin est traversé par le sentier de grande randonnée n° 34. Des graffitis ont envahi les bunkers détruisant certaines peintures murales témoignant de l’occupation par les soldats (fenêtre avec paysage en trompe l'œil notamment). La partie basse du site dite la batterie du Petit Gouin a été mise en valeur par la restauration des fortifications et la mise en place d’un parcours d’interprétation.

  • Murs
    • béton béton armé
  • Toits
    béton en couverture, terre en couverture
  • État de conservation
    état moyen, envahi par la végétation, inégal suivant les parties
  • Techniques
    • peinture
  • Statut de la propriété
    propriété de la commune
  • Intérêt de l'œuvre
    vestiges de guerre, à signaler
  • Éléments remarquables
    ensemble fortifié, batterie, blockhaus, casemate, magasin de munitions
  • Sites de protection
    site classé, zone naturelle d'intérêt écologique faunistique et floristique

Documents d'archives

  • Rapport Pinczon du Sel sur les installations du Mur de l'Atlantique (1946-1949). "Le Mur de l'Atlantique. Livre IV : du Mont Saint-Michel à la Laïta" (collection : Service Historique de la Défense de Brest).

    Service Historique de la Défense de Brest
  • Collection de photographies réunies par Alain Chazette (Librairie Histoire et Fortifications).

    Attention : certaines de ces photographies ne sont pas sourcées.

Bibliographie

  • TRUTTMANN, Philippe. Chapitre "Architecture militaire". In La presqu´île de Crozon, Histoire, Art, Nature, Louis Calvez (dir.), Paris : Nouvelle Librairie de France, 1975.

  • CHAZETTE, Alain, DESTOUCHES, Alain, PAICH, Bernard. Album Mémorial Atlantikwall, Le Mur de l´Atlantique en France 1940-1944. Bayeux : édition Heimdal, 1995, 480 p. ISBN 2-84048088-3.

  • ROLF, Rudi. Atlantikwall-Typenheft. Atlantic Wall typology. Typologie du Mur de l'Atlantique. Middelburg, PRAK publishing, 2008, 432 p.

  • FLEURIDAS, Patrick. HERBOTS, Karel. PEETERS, Dirk. Constructions normalisées. 600-699. 700-704. Regelbauten. S. l., 2008, 183 p., 2-914827-27-X.

  • LÉCUILLIER, Guillaume (dir.), BESSELIÈVRE, Jean-Yves, BOULAIRE, Alain, CADIOU, Didier, CORVISIER, Christian, JADÉ, Patrick. Les fortifications de la rade de Brest : défense d'une ville-arsenal. Rennes : éditions Presses Universitaires de Rennes, collection Cahiers du patrimoine, 2011, n° 94, 388 p.

    Région Bretagne (Service de l'Inventaire du patrimoine culturel)
  • CHAZETTE, Alain. MANTEY, Olivier. DESTOUCHES, Alain. TOMINE, Jacques. PAICH, Bernard. SOLERA, Mario. REBERAC, Fabien. Forteresse de Brest. Maillon du Mur de l'Atlantique. Occupation - vie quotidienne - libération. Vertou, éditions Histoire et fortifications, 2018, 208 p.

  • LANVOC, Nicolas, PERSON, Jean-Luc. La presqu'île de Crozon dans la tempête de l'histoire. Édition : Histoire et traditions de la presqu’île de Crozon, 2020, 175 p. ISBN : 979-10-699-5177-8.

Documents multimédia

  • RELIKTE. Remains of european fortifications 1935-1945. Atlantikwall (cartographie).

    https://www.relikte.info/atlantikwall.html

Annexes

  • La batterie du Petit et du Grand Gouin par Philippe Truttmann
Date(s) d'enquête : 2002; Date(s) de rédaction : 2002, 2023
(c) Association Pour l'Inventaire de Bretagne
(c) Région Bretagne
Lécuillier Guillaume
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