Dossier d’œuvre architecture IA29001811 | Réalisé par
Lécuillier Guillaume
Lécuillier Guillaume

Chargé d'études d'Inventaire du patrimoine à la Région Bretagne.

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  • enquête thématique régionale, Inventaire des fortifications littorales de Bretagne
Cale, édifices logistiques et ensemble de trois magasins à poudre de l'île des Morts (Crozon)
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Bretagne Nord
  • Hydrographies rade de Brest
  • Commune Crozon
  • Lieu-dit Ile des Morts
  • Cadastre WY 1
  • Dénominations
    édifice logistique, poudrière, magasin de munitions, caserne, cale
  • Parties constituantes non étudiées
    cimetière

Étroitement liée à l´île Trébéron toute proche, l´île des Morts servit longtemps de cimetière pour le lazaret, d´où son nom. Conçu par l´ingénieur Jean Tarbé de Vauxclairs en 1807, alors directeur des Travaux maritimes à Brest, cet ensemble architectural situé sur un îlot de la baie de Roscanvel à 9,5 km du château de Brest se compose à l´origine de trois grands magasins à poudre en tout point identiques, isolés dans une double enceinte quadrangulaire dotée de guérites aux angles, d´une maison de gardien et de ses annexes adossées au mur d´enceinte, de deux rampes inclinées, de deux aires de chargement, de deux rampes d´accès (afin d´éviter manoeuvre et croisement) dont l´une est datée par chronogramme de "1814" et de plusieurs cales permettant le débarquement et l´embarquement des hommes et des barils de poudre. Une caserne a également été construite face à la cale est.

Les travaux achevés en 1814 furent dirigés par Jean-Nicolas Trouille, successeur de Jean Tarbé de Vauxclairs.

Originalité architecturale, la guérite sud-est, sur deux niveaux, est à double usage : poste d´observation et latrines ! Situé au sommet topographique de l´îlot qui dut être en partie arasé et aplani par les forçats du bagne de Brest astreints à "la Grande Fatigue", chaque magasin voûté en berceau et couvert d´ardoises est long de 48m et large de 17m. Il dispose d´une capacité de stockage sur deux niveaux de 1 040 m². La poudrière centrale semble avoir été moins utilisée que les deux autres, ainsi n´est-elle dotée que d´une seule série de poteaux afin de soutenir le plancher. La face latérale des magasins est contrebutée par douze contreforts. Enfin, deux murs de refends isolent chaque magasin les uns des autres. Par la suite, une porte a été percée dans le mur intérieur ouest de l´enceinte, afin de permettre un accès direct aux trois magasins, et les murs de refends dotés de passages transversaux.

On peut également encore observer les traces d´une voie Decauville de 60 cm d´écartement et des vestiges de wagonnets. Après la Seconde Guerre mondiale, les poudrières de l´île des Morts servirent au stockage de munitions dites "historiques" avant leur destruction ou leur immersion au large de Brest.

Quelles sont les innovations par rapport au magasin de l´île d´Arun ? Chaque magasin est ici doté d´évents sur trois niveaux et deux escaliers à trois volées droites permettent de desservir l´étage. Mais, c´est surtout dans la disposition du magasin à poudre que réside une évolution majeure : de l´édifice isolé, on passe à un ensemble organisé servant de dépôt et intégrant des notions nouvelles de sécurité par le cloisonnement des espaces. La mise en œuvre soignée, qui fait appel en grande partie à de la pierre de taille en granite (avec remplissage en moellon de grès), les proportions harmonieuses alliées au rythme des ouvertures et à la symétrie de la composition, la rareté de cette typologie dans l´histoire de l´architecture militaire et ici poudrière, font de l´ensemble de l´île des Morts, typique de l´architecture néoclassique du début du 19e siècle, un ensemble remarquable. On pense ici par exemple au logement central en avant-corps ou aux frontons des guérites ou de la lucarne centrale de la caserne de la cale (aujourd'hui masquée par un bardage).

L´île des Morts est souvent citée pour la qualité de ses infrastructures portuaires. Un long quai, quatre cales et un môle permettent un accostage dans toutes les conditions de vent et de mer. Il faut signaler le pavage de l´une des cales en arête de poisson avec chaînes en pierre de taille ou encore l´appareil cyclopéen en grès de la cale sud. Plusieurs canons-bollards permettaient de capeler l’œil des amarres tandis qu´une grue de 3 t à cabestan de type Derrick servant aux manutentions était encore signalée en 1957.

Aujourd'hui ruinées - à l´exception de la cale nord - les cales de l´île des Morts attendent une restauration urgente. À une époque récente, elles servirent de carrière à l´arsenal... Cet exemple montre une nouvelle fois la nécessité d´entretenir a minima les édifices relevant du patrimoine maritime afin d´éviter une trop lourde et trop coûteuse restauration. La question du transfert de propriété de l´île au Conservatoire du littoral se posera nécessairement à moyen terme. À l´heure actuelle, interdite d´accès comme l´île Trébéron, l´île des Morts est débroussaillée a minima. Au fil des ans, les poudrières (dont les planchers et escaliers étaient toujours en place jusqu'en 1967 au moins) sont de plus en plus envahies par la végétation ce qui constitue souvent la première étape d´un long processus de destruction.

(Lécuillier Guillaume, 2011).

  • Murs
    • schiste
    • microdiorite quartzique
    • kersantite
    • ciment
    • enduit partiel
    • moellon sans chaîne en pierre de taille
  • Toits
    pierre en couverture, ciment en couverture
  • Plans
    plan rectangulaire régulier
  • Étages
    rez-de-chaussée, étage de comble
  • Couvertures
    • toit à longs pans
  • État de conservation
    mauvais état, désaffecté, inégal suivant les parties, envahi par la végétation
  • Mesures
    • l : 45 m
    • la : 12 m
  • Statut de la propriété
    propriété de l'Etat
  • Intérêt de l'œuvre
    vestiges de guerre, à signaler

Il s'agit d'un site en terrain militaire : l'accès est interdit sans autorisation préalable. Le débarquement est également strictement interdit. La couverture photographique a été réalisée dans le cadre d'une visite encadrée le jeudi 20 septembre 2007. Une protection au titre des Monuments historiques est vivement préconisée.

Documents d'archives

  • Service Historique de la Défense, Brest 1 - Correspondance (1776-1882) 1 K 4 : Enregistrement des rapports et devis de l´ingénieur en chef puis directeur (1810-1821). 1 K 4-1 (1810-1816) : Fonds à faire pour 1810 pour l´exécution de divers ouvrages : poudrières de l´île aux Morts, ligne sémaphorique, clôture du port, nouvelle prison, levée de Pontaniou (5 mars 1810, p.32). Lazaret de Trébéron (16 novembre 1810, p. 72). Poudrières de l´île aux Morts (28 novembre 1810, p ; 85). Logement des prisonniers de guerre dans les établissements de Pontanézen et Trébéron (16 janvier 1814, p. 227). Poudrières de l´île des Morts (10 septembre 1813, p. 236). Caserne de l´île des Morts (16 mai 1814, p. 245).

    Archives du Service historique de la Marine (Brest)

Bibliographie

  • BUREL, Marcel. Dans la rade de Brest, l´île de Trébéron et l´île des Morts. Bannalec, Imprimerie régionale, 2003, 190 p.

    Centre de Recherche Bretonne et Celtique, Bibliothèque Yves Le Gallo (Brest) : C-19628-00

Documents figurés

  • BUREL, Marcel. Dans la rade de Brest, l´île de Trébéron et l´île des Morts. Bannalec, Imprimerie régionale, 2003, 190 p.

Annexes

  • Iconographie
  • L'île des Morts en 1895 par Victor-Eugène Ardouin-Dumazet ("Voyage en France...", tome 4, 1893-1921)
Date(s) d'enquête : 2004; Date(s) de rédaction : 2004, 2022
(c) Association Pour l'Inventaire de Bretagne
(c) Région Bretagne
Lécuillier Guillaume
Lécuillier Guillaume

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