Dossier d’œuvre architecture IA29133736 | Réalisé par
Lécuillier Guillaume (Contributeur)
Lécuillier Guillaume

Chargé d'études d'Inventaire du patrimoine à la Région Bretagne.

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  • enquête thématique régionale, Inventaire des héritages militaires en Bretagne
Bunker dit Tobruk-Stand pour tourelle de char français de type R35 (Lo 6), Merrien (Moëlan-sur-Mer)
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Bretagne
  • Hydrographies Rivière de Merrien
  • Commune Moëlan-sur-Mer
  • Lieu-dit (sur le chemin côtier) Merrien
  • Cadastre BI 401
  • Dénominations
    blockhaus, abri, poste d'observation

C’est sur le tracé du chemin côtier longeant la ria de Merrien que l’on peut découvrir ce bunker construit par l’Allemagne nazie surmonté d’une tourelle de char français. Ce type de bunker est surnommé Tobruk-Stand. Fabriquée en 1937, la tourelle, dotée à l’origine d’un canon de 37 mm et d’une mitrailleuse de 7,5 mm, armait en 1940 un char français du 38e bataillon de chars de combat avant d’être capturée puis réemployée dans le Mur de l’Atlantique (Atlantikwall).

En 1993, la tourelle a été découverte basculée dans la tranchée d’accès du bunker par Gil Van Meeuwen**. Avec l’accord de la mairie de Moëlan-sur-Mer, elle a été repositionnée sur le bunker le 16 mars 1993 par une équipe composée de Patrick Andersen Bo***, de Gil Van Meeuwen et des services techniques de la commune*. Un film a été tourné à cette occasion.

C’est la seule tourelle de char à être visible sur son bunker d’origine dans l’espace public en Bretagne****.

Ce dossier d’Inventaire du patrimoine a été créé par la Région Bretagne en 2024 dans le cadre de l'Inventaire des héritages militaires. Il avait fait l'objet d'une notice de recensement en 2016 dans le cadre de l'Inventaire du patrimoine de Quimperlé Communauté.

Tout enrichissement est le bienvenu.

* Une découverte fortuite doit obligatoirement remonter en mairie et à la Direction régionale des affaires culturelles - Service régional de l'archéologie. Ce genre de travaux - déblaiement sans suivi archéologique, repositionnement et restauration des éléments blindés - est en 2024 totalement proscrit.

** Spécialiste du Mur de l’Atlantique, Gil Van Meeuwen est au moment de la rédaction de ce dossier (2024), président de l’association Mémoire patrimoine de Clohars-Carnoët. Cette association a notamment œuvré à la valorisation du bunker-casemate de type 625 du Pouldu à Clohars-Carnoët.

*** Spécialiste du Mur de l’Atlantique, auteur de plusieurs livres sur le sujet et agent responsable des collections du Musée de la Résistance en Bretagne à Saint-Marcel, Patrick Andersen Bo est décédé en 2003.

**** Une tourelle de char est signalée au Pont Avet dans la commune de Pleurtuit près de Dinan sur la ligne de défense du Frémur. Une autre tourelle de char serait également conservée à La Baule dans un terrain privé. Des vestiges de tourelle de char FT17 gisent encore à Cléder et en presqu’île de Crozon.

Une tourelle de char FT17 est présentée sur un bunker reconstitué au Musée de la Résistance en Bretagne (elle provient de Saint-Brévin-Les-Pins, rive sud de l'estuaire de la Loire). Une autre tourelle FT17 est présentée au Mémorial 1939-1945 de la Cité d’Aleth à Saint-Malo (elle était sur un bunker situé aux Corbières à Saint-Malo). Deux tourelles de char - Somua S-35 et Panzerkampfwagen (véhicule blindé de combat) - sont également présentées au Musée de la Guerre 1939-1945 de Dinan.

Le bunker dit Tobruk

Ce bunker surmonté d’une tourelle de char français a été construit fin 1942, début 1943 sous maîtrise d’ouvrage de l’Organisation Todt. Classé comme construction de campagne renforcée en béton (verstärkt feldmässiger Ausbau in Beton, en abrégé "VF"), son plan s’approche d’un type 25 (Fundament für Französisch Panzerkampfwagenturm). Il est conçu pour un équipage de deux soldats : le premier faisant fonctionner les armes de la tourelle : canon jumelé à une mitrailleuse, le second affecté à l’approvisionnement en munition.

Le bunker appartient à l’ensemble fortifié de Kersecol à Moëlan, dont l’objectif est la défense de la rivière de Merrien et de son port. Plus largement, cet ensemble fortifié numéroté "Lo 6" est lié à la défense de la ville-arsenal de Lorient érigée en 1944 au rang de forteresse (Festung) et qui s’étend sur le littoral, de l’embouchure de la rivière de Bélon à l’ouest à la rivière d’Etel à l’est.

Cet ensemble fortifié se compose d’un bunker-abri de type 600 avec cuve pour canon de 5 cm (construction permanente, Ständig Ausbau, abrégé en "St" ; équipage de 6 soldats), de deux bunkers - postes d’observation et de tir de type 58c dits Tobruk-Stände, d’un poste d’observation et de tir pour mitrailleuse, d’un poste d’observation, d’un puits protégé, d’un bassin à ciel ouvert et de baraques servant de logement. Du côté de la terre, la défense est complétée par des champs de mines.

De l’autre côté de la rivière se trouve un corps de garde avec guérite datable du 18 siècle.

Une tourelle de char français

Conçue par l’atelier de construction de Puteaux, la tourelle a été fabriquée en 1937 à Rueil (voir la description du marquage). Ce type de tourelle monoplace est destiné aux chars légers Renault R35 ou Hotchkiss H35. La tourelle est armée d'un canon de 37 mm (modèle 1918, puis 1938) et d'une mitrailleuse MAC de 7,5 mm (modèle 1931).

Un marquage peint à l’arrière de la tourelle : as de cœur de couleur rouge sur fond blanc, visible lors de sa découverte en 1993, atteste que la tourelle était vraisemblablement montée sur un char Hotchkiss H35 appartenant au 38e bataillon de chars de combat (3e compagnie, 2e section) en 1940.

Saisie, puis remployée par l’Allemagne nazie dans le Mur de l’Atlantique, cette tourelle désignée "Panzerkampfwagen 35R 731 (f)" est ici implantée en position de char (Panzerstellung). Son canon de 37 mm est désigné par l’occupant "3,7 KwK 144 (f)" ; sa mitrailleuse désignée "Mg 311 (f)".

 

Une tourelle portant de nombreux impacts

La tourelle a été touchée par sept ou huit projectiles antichars, soit pendant la Libération - Moëlan est libéré le 5 août 1944 - soit durant la Poche de Lorient (12 août 1944 - 8 mai 1945) où elle aurait servi de cible d'entrainement aux américains. Suite aux tirs, la tourelle a basculé en arrière dans la tranchée d’accès du bunker.

 

La découverte et la valorisation de la tourelle de char sur son Tobruk

La tourelle, son tourelleau et d’autres éléments sont redécouverts en 1993 dans la tranchée d’accès du bunker par Gil Van Meeuwen. Le 16 mars 1993, c’est avec l’accord de la mairie de Moëlan-sur-Mer que la tourelle a été relevée et repositionnée sur le bunker à l’aide d’un tire-fort par une équipe composée de Patrick Andersen Bo, de Gil Van Meeuwen et des services techniques de Moëlan-sur-Mer.

Bunker-poste d’observation et de tir en béton armé surmonté d’une tourelle de char en acier blindé. Il est implanté sur la rive orientale de la ria de Merrien, juste avant le port.

Pour des raisons de protection et de camouflage, le bunker est enterré dans le sol (la dalle de couverture affleure), seule la tourelle émerge.

Il comporte une unique entrée, percée dans l’élévation sud-est, du côté le moins exposé à une attaque terrestre. L’entrée est précédée d’une tranchée d’accès.

Le bunker se compose d’une chambre d'abri (Unterschlupfraum) faisant vestibule et d’un poste d’observation et de tir qui reçoit la tourelle. La tourelle blindée peut tourner à 360 degrés sur son chemin de roulement.

La tourelle de char

La tourelle porte le marquage "APX.R.T. 1937 / PM 1633 8". L’acronyme "APX" correspond au concepteur de la tourelle, l’Atelier (A) de construction de Puteaux (PX) ; la lettre "R" désigne l'atelier de Rueil où elle a été fabriquée ; le chiffre "1" correspond à la version améliorée APX R1 doté d’un canon de 37 mm modèle 1938 ; la date "1937" est l’année de fabrication du corps de la tourelle. Son tourelleau porte également un marquage "FRA".

La tourelle présente plusieurs impacts de tir dont certains perforant.

Elle a été partiellement restaurée après son repositionnement sur le bunker.

Dépourvue de peinture, la tourelle oxydée par la rouille est de couleur brun-rouge. Ses marquages ont disparu.

  • Murs
    • béton béton armé
  • Toits
    béton en couverture
  • Plans
    plan rectangulaire régulier
  • Étages
    sous-sol
  • Couvertures
    • terrasse
  • État de conservation
    état moyen, restauré
  • Techniques
    • peinture
  • Statut de la propriété
    propriété privée
  • Intérêt de l'œuvre
    vestiges de guerre, à signaler
  • Éléments remarquables
    blockhaus, abri, poste d'observation

Documents d'archives

  • Rapport Pinczon du Sel sur les installations du Mur de l'Atlantique (1946-1949). "Le Mur de l'Atlantique. Livre IV : du Mont Saint-Michel à la Laïta" (collection : Service Historique de la Défense de Brest).

    Service Historique de la Défense de Brest

Bibliographie

  • ANDERSEN BO, Patrick. Le Mur de l´Atlantique en Bretagne. 1944-1994. Rennes : éditions Ouest-France, Edilarge, 1994, 126 p., ISBN 2-7373-1291-4.

    p. 62-65
  • CHAZETTE, Alain, PAICH, Bernard, DESTOUCHES, Alain, BOULARD, Emmanuel. Tobrouk Typologie. Atantikwall - Südwall. Paris : éditions Histoire et fortifications, 2004, 64 p,

  • ROLF, Rudi. Atlantikwall-Typenheft. Atlantic Wall typology. Typologie du Mur de l'Atlantique. Middelburg, PRAK publishing, 2008, 432 p.

Périodiques

  • Le Mur Fortifs, n° 22, juin 1993.

Documents multimédia

  • Axis history forum. Sujet : "Bunkers with tank turrets !". 15 janvier 2003.

    https://forum.axishistory.com/viewtopic.php?t=14464

  • Association Mémoire Patrimoine - Clohars-Carnoët. VAN MEEUWEN, Gil. "Merrien - Tourelle de char R 35 sur tobrouk - découverte - 1993", 5 novembre 2021.

    https://memoirepatrimoine.wordpress.com/2021/11/05/merrien-tourelle-de-char-r-35-sur-tobrouk-decouverte-1993

  • Association Mémoire Patrimoine - Clohars-Carnoët. "Le mur de l’Atlantique de Doëlan à Kerfany".

    https://memoirepatrimoine.wordpress.com/2020/12/27/le-mur-de-latlantique-de-doelan-a-kerfany

Annexes

  • Le poste d’observation et de tir en béton armé : du Ringstand au Tobruk
Date(s) d'enquête : 2024; Date(s) de rédaction : 2025
(c) Région Bretagne
Lécuillier Guillaume
Lécuillier Guillaume

Chargé d'études d'Inventaire du patrimoine à la Région Bretagne.

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